L'assistance, un secteur qui résiste et s'exporte
Par Nicolas Deguerry - Le 01 juin 2012.
Nouveaux marchés, d'un côté, évolution continue de l'offre de services très sensible à l'innovation technologique, de l'autre, le secteur des sociétés d'assistance connaît en permanence des mutations profondes qui requièrent un important volet social d'accompagnement. Au cœur de ce dernier, l'accord formation signé le 9 mars 2012 par la branche.
Même si les sociétés d'assistance n'ont plus les niveaux de croissance à deux chiffres des années 2000, les chiffres 2011, présentés le 22 mai par Nicolas Gusdorf, président du Syndicat national des sociétés d'assistance (SNSA), témoignent de la vitalité d'un secteur qui résiste fort bien à la crise : + 5,7 % de chiffre d'affaires pour la France, + 5 % à l'international. Des résultats positifs qui doivent aussi bien à la bonne tenue des services historiques de l'assistance voyage et automobile qu'au développement de nouvelles prestations, notamment dans le champ des services à la personne (services à domicile, services de conciergerie [ 1 ]Billetterie de trains, d'avions, de spectacles, etc., etc.).
Des opportunités de carrière
En termes d'emploi, la situation se traduit par 7 163 personnes employées en 2011 par les 10 entreprises membres du SNSA, qui représentent 96 % du secteur. Soit une hausse de 1 % par rapport à l'année précédente. Affichant un discours d'exemplarité sur le plan social, le SNSA souligne employer 25 % de cadres, dont 45 % de femmes, lesquelles représentent près de 65 % des salariés de la branche. Alors que 1 950 saisonniers sont venus renforcer les équipes pendant le pic d'activité hivernal et la saison estivale, le président du SNSA revendique là de “vrais contrats de travail" présentant tous les avantages de l'intérim :“Très enrichissants pour les jeunes gens" à qui ils offrent une première expérience, ces contrats saisonniers “permettent également d'attendre un emploi ou de continuer ses études" du fait d'une organisation en continu qui autorise des “emplois du temps souples et allégés" répartis en temps partiel, week-ends, nuits, etc.
Au total, 39 métiers de l'assistance ont été identifiés et décrits par l'observatoire des métiers et de l'égalité professionnelle, organisme paritaire de la branche créé en 2007. Il s'agit pour moitié de métiers spécifiques à l'assistance (accueil, médical, relations prestataires, etc.), pour moitié de métiers supports (commercial et marketing, informatique et téléphonie, RH, administratif). Les services sont structurés en six domaines : voyage (prise en charge et rapatriement sanitaire, assurance annulation et bagages) ; automobile (dépannage, véhicule de remplacement) ; médical (soins et aide à domicile) ; services à la personne hors soins médicaux (assistance scolaire, jardinage, aide au quotidien, etc.) ; habitat (maintenance et réparations diverses) ; autres (assistance à l'expatriation, suivi à long terme de grands accidentés, services de conciergerie). Parmi les 39 métiers de l'assistance, les métiers “historiques" (assistance voyage et automobile) restent prédominants et connaissent un fort développement dans les pays émergents. L'international, qui représente déjà 61 % du chiffre d'affaires global du secteur, paraît également assurer l'avenir des autres prestations : “Si les prestations ou solutions en santé restent liées au contexte économique et culturel local, il est peu de prestations qui ne puissent trouver d'intérêt à être dupliquées dans d'autres pays, dès lors que la problématique du consommateur est identique (espérance de vie en hausse, accroissement de la mobilité, éclatement de la cellule familiale, limites de la protection sociale)", analyse le SNSA.
Un accord formation qui valorise le “tutorat opérationnel"
Face à ces enjeux, l'accord formation signé le 9 mars dernier par la branche est notamment venu rappeler “les obligations en matière de formation et de lutte contre la discrimination, le rôle des commissions formation et l'importance du tutorat pour le lien transgénérationnel", souligne Nicolas Gusdorf.
“Nous avons souhaité aller au-delà d'un accord formation classique qui déclinerait au sein d'un accord de branche des spécificités purement légales, nous explique Catherine Henaff, secrétaire générale du SNSA : ce qui fait la différence, c'est que nous avons voulu un accord novateur inspiré de problématiques opérationnelles et de terrain. Dans un premier temps, nous avons rappelé le rôle des différents acteurs − par exemple, celui des Opca, qui apparaît flou après la réforme de 2012. L'objectif était de dire qu'un Opca est l'un des acteurs qui accompagne dans le domaine de la formation professionnelle et qui peut être éclairant par rapport à un certain nombre de souhaits, soit individuels dans le cadre d'une demande du collaborateur, soit collectifs dans le cadre d'une action de l'entreprise.
Deuxièmement, il s'agissait de rappeler que nous sommes sur un terrain très pragmatique et opérationnel, avec des aspects techniques forts qui nécessitent une dimension formation exemplaire. Or, cette formation peut s'effectuer de deux manières : de façon classique dans le cadre du plan de formation ou, deuxième possibilité, en mobilisant l'expertise de nos collaborateurs pour répondre à nos réalités de terrain."
Pour ce faire, Catherine Henaff a introduit la notion − nouvelle au SNSA − de “tutorat opérationnel". Et d'expliquer : “Si le rôle du tuteur légal est bien défini dans le cadre d'un parcours en alternance, rien n'est prévu au plan juridique pour le tuteur opérationnel. Son rôle est pourtant fondamental, puisque c'est lui qui va accueillir le jeune ou celui qui change de métier, pour transmettre expérience, regard et dimension technique."
Qui est concerné ? Du côté des tutorés, avant tout les nouveaux arrivants dans un domaine d'activité, et notamment les chargés d'assistance qui interviennent sur les plateformes. Soulignant l'importance du tutorat pour cette fonction qui représente près de 50 % de l'effectif et connaît près de 10 % de turn-over, Catherine Henaff rappelle que ces intervenants sont en “perpétuel apprentissage", tant pour répondre aux évolutions technologiques qu'aux besoins du client et au marché. Du côté des tuteurs opérationnels, sont notamment concernés les plus de 55 ans ayant une longue expérience dans l'entreprise, sur la base du volontariat et après une formation préalable. En phase de finalisation avec Opcabaia, la formation de tuteur opérationnel devrait comporter un tronc commun et, concurrence oblige, des modules spécifiques à chaque adhérent.
Également évoquées par l'accord formation, les commissions formation sont, elles, invitées à investir pleinement leur double vocation : “Celle de préparer les comités d'entreprise, mais aussi celle d'être proche du terrain, de donner des informations et des explications aux collaborateurs", insiste Catherine Henaff. Invitant les entreprises à faire des commissions formation un “outil de dialogue social et de communication", la secrétaire générale y voit une aide bienvenue “sur des sujets comme l'orientation et la réorientation professionnelle".
Appui à la reconversion par les aires de mobilité
Secteur exigeant du fait des contraintes liées aux “sept jours sur sept, vingt-quatre heures sur vingt-quatre", les métiers de l'assistance entraînent des demandes d'évolution récurrentes pour lesquelles des “aires de mobilité" ont été créées. Permettant de mesurer l'écart de compétences entre le poste occupé et le poste visé, elles s'appuient sur un référentiel de compétences construit à partir des fiches métiers fournies par l'observatoire des métiers et de l'égalité professionnelle du SNSA. “Qu'il s'agisse d'un souhait de reconversion individuel ou collectif, l'objectif est de permettre aux personnes de se réadapter dans une nouvelle activité de façon à sauvegarder l'emploi, même lorsqu'il y a perte du métier ou disparition d'une activité", souligne Catherine Henaff, qui voit dans le dispositif les “prémisses d'une GPEC". Précision du président Nicolas Gusdorf : “Tout est négocié avec les partenaires sociaux dans l'objectif d'éviter qu'un collaborateur ne reste trop longtemps dans un emploi qu'il ne souhaite plus occuper. Un technicien informatique peut ainsi devenir administrateur réseaux et systèmes ou administrateur téléphonique, un chef de produit marketing peut devenir commercial clients entreprises, un chargé de gestion commerciale peut devenir administrateur réseaux, etc. Les aires de mobilité sont faites pour déterminer les nouvelles compétences à acquérir et mieux préparer le collaborateur à exercer dans un nouveau domaine sans aller à l'échec."
Autre mesure sociale particulièrement innovante, selon le président du SNSA, le congé de solidarité familiale, à destination des collaborateurs qui accompagnent un proche en fin de vie. Créé par l'accord du 2 mai 2011, cet accord prévoit notamment l'octroi d'une rémunération forfaitaire et la possibilité de suivre une formation aide aux aidants de deux jours maximum.
Quand les "Assisteurs" aident les dépanneurs
Décrivant un système “gagnant-gagnant", la secrétaire générale des sociétés
d'assistance Catherine Henaff se félicite de l'instauration en avril 2011 d'un dialogue social entre les entreprises membres du SNSA et les sociétés de dépannage.
Outre une meilleure compréhension des enjeux respectifs, les premiers résultats s'avèrent encourageants, puisque les adhérents ont notamment décidé d'allouer une partie de leur taxe d'apprentissage (150 000 euros sur trois ans) à des organismes collecteurs intervenant pour le compte des dépanneurs. Ceux-ci pourront ainsi se former à l'informatisation des procédures d'intervention mises en place par les sociétés d'assistance,
qui participent ainsi à la professionnalisation de leurs partenaires.
Notes
1. | ↑ | Billetterie de trains, d'avions, de spectacles, etc |