N° 3 - Janvier-Février 2018
Un Hackaton consacré à la formation
Par Nicolas Deguerry - Le 17 janvier 2018.
C'est l'été indien sur le campus bucolique du groupe Crédit agricole à Montrouge, au sud de Paris, en ce samedi 15 octobre après-midi. Au sein des locaux flambant neufs de l'Université d'entreprise du groupe bancaire se déroule un “hackathon" (marathon de hackers, voir encadré), pendant tout le week-end (33 heures d'affilée exactement). Les organisateurs ? Le cercle APE (Apprendre ensemble), un collectif de passionnés d'éducation et de formation créé en 2015 et qui compte aujourd'hui 900 membres dans le monde francophone. Le titre de ce “marathon interactif" : “Apprendre ensemble de 3 à 99 ans à l'ère du digital".
Huit groupes pluridisciplinaires
Responsables de formation d'entreprises, universitaires, “start-upers", étudiants, professionnels de l'éducation et des RH, près de 200 participants sont attendus pour relever 8 “défis" sur les thèmes des formations digitales et du “management bienveillant".
Dans les salles réparties sur les deux étages du bâtiment, les huit groupes pluridisciplinaires commencent à phosphorer autour de problématiques telles que “le pilotage et la collecte de la data à travers la formation", “le vécu d'une intégration immersive et collaborative au sein d'une organisation", ou encore “l'apprentissage en situation de handicap grâce à la 3D". “Ces défis, ces thématiques nous ont été soumis en amont par les participants", précise Dorothée Cavignaux-Bros, ingénieure pédagogique, l'une des organisatrices du hackathon.
Circulant d'un étage à l'autre du bâtiment, telles des abeilles dans une ruche, les participants ont revêtu des t-shirts distinctifs : violet pour les organisateurs, orange pour les “coachs interdéfis" (les facilitateurs au sein des groupes) et blanc pour les participants.
“Avec ce hackathon et avec d'autres types d'événements que nous organiserons dans les mois qui viennent, nous souhaitons explorer les façons d'apprendre ensemble. Nous avons déjà écrit un livre collaboratif et animé un Mooc", explique Denis Cristol[ 1 ]Denis Cristol est également directeur de l'ingénierie et des dispositifs de formation du CNFPT (Centre national de la fonction publique territoriale)., le créateur du cercle, chercheur associé à Paris Ouest Nanterre. Il a eu l'idée de la démarche après un séjour d'étude au Canada.
L'approche connectiviste
Arrivée le matin même de sa Suisse natale, Virginie Guignard-Legros est la responsable du Cercle APE International. Selon elle, la raison d'être de ce hackathon est de tourner le dos aux méthodes d'apprentissage traditionnelles. “Nous privilégions l'approche connectiviste, horizontale, qui permet d'enrichir sa connaissance grâce à celle que nous apportent les autres. Les apprenants deviennent des professeurs et vice-versa", explique-t-elle, tout en transmettant en direct notre entretien à sa communauté éducative francophone ! “J'ai pour objectif, pendant ce hackathon, de rédiger un e-book [livre électronique] sur les outils collaboratifs, les visioconférences et les usages pratiques des nouvelles technologies", explique cette spécialiste de l'accompagnement de projets innovants en matière de formation.
En version originale
Pour résoudre les défis qui vont rythmer ce hackathon, entre deux conférences explorant le rapport entre “l'humanisme et le digital", les participants sont invités à recourir aux méthodes de créativité et de “design thinking" (co-créativité impliquant des retours de l'utilisateur final). Objectif : réaliser des prototypes ainsi que des “pitchs" (synthèse de projets en un petit paragraphe) lors de la séance finale de restitution, le dimanche, dès 15 heures. On pénètre dans un vaste espace de “brainstorming" (remue-méninges) et, soudain, on aperçoit un robot suivi de près par une dizaine de collégiens, apprentis journalistes, qui se relaient pour interviewer les participants aux défis.
Travailler la nuit, un gain de temps !
Pour vivre au mieux ces 33 heures de hackathon, chacun a pris ses dispositions. Des matelas sont disposés dans une grande salle à l'étage. Virginie Guignard-Legros a réservé un hôtel. “Je dois récupérer quelques heures", sourit-elle. “La valeur ajoutée du hackathon est de permettre à des gens qui aiment créer la nuit de le faire en toute liberté. C'est également un gain de temps pour tout le monde", pointe Jocelyne Turpin, présidente d'une agence parisienne qui accompagne les entreprises dans la migration vers le digital learning.
Directrice de l'Université d'entreprise du Crédit Agricole (160 collaborateurs), Christelle Chappaz est ravie d'inaugurer ses locaux avec le premier hackathon organisé par le cercle APE. “Cette démarche est totalement en phase avec l'approche innovante et ouverte que j'essaie d'impulser dans cette structure", se réjouit-elle.
Pour financer cet événement, dont le budget avoisine les 15 000 euros, les membres du cercle ont, d'une part, vendu en ligne leur ouvrage collectif Osons le cercle d'apprentissage et, d'autre part, fait appel à des mécènes et à des partenaires (Total, Médecins du Monde, Erasmus+, Dassault Système, Cegos, etc.), présents lors de l'événement. “Il y a eu aussi beaucoup d'huile de coude", sourit Denis Cristol.
Notes
1. | ↑ | Denis Cristol est également directeur de l'ingénierie et des dispositifs de formation du CNFPT (Centre national de la fonction publique territoriale). |