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Comment simplifier le financement de l'apprentissage? (Antoine Amiel)

Dans une tribune pour la Fondation Jean Jaurès publiée récemment, Antoine Amiel, fondateur de Learn Assembly défend le système de l'apprentissage né de la réforme de 2018. Tout en plaidant pour une simplification de son modèle de financement et la professionnalisation des CFA.

Par - Le 28 novembre 2023.

En moins de cinq ans, l'apprentissage s'est imposé en France. De 2019 à 2023, le nombre d'apprentis passe ainsi de 320 000 à plus de 830 000 dans un pays où cette modalité de formation ne parvenait pas à trouver sa place. Mais l'indiscutable succès quantitatif du système né avec la réforme de 2018 a très vite nourri les critiques. A la veille de nouvelles concertations, la charge s'intensifie autour de son coût pour les finances publiques, de la qualité jugée insuffisante de ses parcours, jusqu'à la crainte d'une marchandisation de l'éducation des jeunes. Au fil des rapports de la Cour des comptes ou de l'Igas, des voix s'élèvent pour dénoncer une trajectoire financière hors de contrôle, la sur-représentation de l'enseignement supérieur et les pratiques contraires à l'esprit de l'apprentissage de certains acteurs de la filière.  Le sujet occupe de plus en plus le débat public. Dans une tribune réalisée par Antoine Amiel pour la Fondation Jean Jaurès, le fondateur de Learn Assembly alerte sur la tentation de « repartir à zéro » plutôt que de faire évoluer un système qui, à bien des égards, a fait ses preuves. Loin de nier ses dysfonctionnements mais convaincu de la dimension méritocratique et de l'efficacité en matière d'insertion professionnelle de l'apprentissage, le dirigeant engagé invite à une réflexion de fond sur les pistes d'amélioration.

Un nouveau mode de calcul des niveaux de prise en charge

Sa tribune pointe le mode de fixation des niveaux de prise en charge des contrats d'apprentissage (NPEC). Trop compliqué, fondé sur le modèle économique des CFA, et sur le travail de branches - pas toujours outillées pour les plus petites, parfois juges et parties quand elles possèdent des établissements- , la méthode génère des incohérences, des écarts incompris sur des formations similaires et de constants ajustements. Antoine Amiel préconise des prix plancher durables fixés au niveau national en fonction de la nature des métiers et des fondamentaux économiques des formations. Autre levier d'optimisation du financement de l'apprentissage, une remise à plat des exonérations de la contribution à la formation, des subventions des financeurs accordées aux CFA et des aides à l'embauche afin de simplifier et de mieux orienter les politiques publiques. Ce travail d'évaluation, de ciblage et de rationalisation permettrait de dégager des ressources. La prime exceptionnelle de 6 000 euros par apprenti pourrait ainsi être conditionnée à la taille de l'entreprise ou aux besoins de recrutement des secteurs en tension.

Renforcer les exigences qualité pour professionnaliser la filière

La libéralisation de l'apprentissage a ouvert le marché. Selon les estimations, on compte plus de 3000 CFA contre à peine plus de 500 avant la réforme de 2018. Cette dynamique doit s'accompagner, selon Antoine Amiel, d'un renforcement des exigences qualité. La professionnalisation de la filière passe notamment par la transparence des indicateurs de performance des formations dispensées par les CFA. L'auteur de la tribune propose ainsi de rendre obligatoire la publication des taux d'insertion professionnelle ou de poursuite d'études ou encore des taux de rupture à l'initiative des élèves. Les audits de contrôle nombreux, souvent mal coordonnés entre les différents financeurs et trop centrés sur la vérification de process, devraient privilégier la dimension pédagogique des parcours. L'audit sur le terrain réalisé par des professionnels de la formation devrait ainsi être systématisé et inclure des entretiens anonymisés avec les apprentis et les employeurs, la double écoute ou encore une analyse de la stratégie numérique d'un établissement et la qualité de ses formations à distance.