Des entreprises concurrentes se réunissent pour former des jeunes éloignés de l'emploi sur des métiers en tension

D'un côté, des entreprises sous-traitantes qui peinent à trouver des personnes formées pour peindre les avions qui sortent des chaînes d'assemblage d'Airbus. De l'autre, des jeunes avec des fragilités sociales, faiblement qualifiés, issus de quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPPV) ou fraîchement arrivés en France. Au milieu, Garonne Emploi, un groupement de 38 entreprises de la région toulousaine qui se demande comment rapprocher les deux.

La solution a vu le jour après quatre ans d'étude de faisabilité par la création, en mai 2019, d'un Geiq (groupement d'employeurs pour l'insertion et la qualification) Industrie. Philippe Guarch Ferrer, directeur de Garonne Emploi et auteur de l'étude, a pris son bâton de pèlerin pour convaincre les partenaires du territoire de l'intérêt de la démarche : Direccte, Pôle emploi, entreprises, branche… “Cette approche invite les entreprises industrielles à penser autrement l'emploi et la formation, à réfléchir collectif et à construire à plusieurs, voire entre entreprises concurrentes, ce qu'individuellement elles ne sont pas toujours en capacité de réaliser", souligne Christophe Abella, directeur emploi-formation à l'UIMM MP-Occitanie.

Former au savoir-être

Pour rapprocher des entreprises des jeunes de 18 à 26 ans qui n'ont pas toujours le savoir-être que celles-ci attendent, le Geiq Industries d'Oc a concocté un parcours de quinze mois associant différents partenaires. Après une information collective à Pôle emploi, un job dating et des entretiens avec les entreprises membres du Geiq (GIT, Mecaprotec, Sabena et Satys) permettent de sélectionner une douzaine de profils par session, dont la deuxième a démarré début février.

Les quinze mois commencent par trois mois de préparation opérationnelle à l'emploi collective (POEC), financée par l'Opco 2i, dont le top départ se fait au sein du club de rugby du Stade Toulousain. Un moyen de découvrir l'importance de l'esprit d'équipe en compagnie du célèbre Émile Ntamack^{[ 1 ]}Ancien joueur du Stade toulousain et de l'équipe de France de rugby à XV. ! “Cette période de POEC est vitaminée, explique Philippe Guarch Ferrer : en plus des 210 heures de formation technique avec IFI Peinture, on ajoute trois semaines de stage en entreprise (au lieu de deux) et 85 heures de travail sur le savoir-être avec Rebonds !"

Maintenir dans l'emploi

L'association Rebonds !, créée par un ancien rugbyman, qui intervient depuis longtemps dans les quartiers sensibles, propose des séjours de team building, des activités physiques et théâtrales qui aident à développer confiance en soi, communication verbale et non verbale. À l'issue de la POEC, les stagiaires repassent par le Stade Toulousain pour signer leur contrat de professionnalisation. À la fin de leur contrat de neuf à douze mois, selon les entreprises, payé au Smic, l'embauche en CDI est garantie sous réserve qu'ils obtiennent leur CQPM (certificat de qualification paritaire de la métallurgie) de peintre aéronautique.

Tout au long des quinze mois, les stagiaires sont soutenus par une tutrice sociale pour tous les problèmes de logement, mobilité, santé ou questions qu'ils peuvent se poser. “Pendant la durée du contrat pro, je m'assure de leur maintien dans l'emploi", explique Josepha Escaich, chargée de mission. Prochaine étape : féminiser les effectifs (les deux premières sessions ne comprenaient qu'une femme pour onze ou douze hommes), avec une troisième promotion 100% féminine au printemps. Ensuite, le Geiq s'attaquera à d'autres métiers en tension : soudage, ajustage-montage, usinage ou maintenance industrielle.