On manque de femmes dans les carrières scientifiques et techniques
Par Nicolas Deguerry - Le 01 mai 2010.
“Mobiliser les jeunes femmes autour des perspectives d'avenir dans les carrières scientifiques et techniques, les informer sur les métiers d'ingénieurs et les sensibiliser aux atouts de la mixité dans les équipes de travail", tel était le triple objectif du “rallye des métiers" organisé les 30 et 31 mars dernier par l'association Elles Bougent.
“Il s'agit, nous explique Marie-Sophie Pawlak, présidente de l'association, d'intervenir en amont pour susciter des vocations chez les jeunes filles en utilisant des témoignages de femmes en poste". Pourquoi ? “Alors que les terminales scientifiques comptent aujourd'hui 48 % de filles pour 52 % de garçons, elles ne sont que 10 % à choisir de devenir ingénieur, la majorité se destinant aux filières de l'enseignement, du médical et du paramédical ou du management et du commerce". Un phénomène “purement sociétal", selon Marie-Sophie Pawlak, qui estime que tout commence “au pied de l'arbre de Noël" et se poursuit au moment des choix d'orientation lorsque, “même inconsciemment, les parents - les premiers prescripteurs - poussent moins les filles".
Ceci en dépit d'un constat pointé par l'association : “les filles ont de meilleurs résultats scolaires que les garçons, elles sont en moyenne plus diplômées (25 % des femmes de 25 à 34 ans ont un diplôme supérieur à bac + 2, contre 19 % des garçons du même âge) et pourtant, les choix d'orientation ne sont pas les mêmes : filles et garçons ne s'inscrivent pas dans les mêmes métiers et les trajectoires professionnelles ne se déroulent pas de la même façon, les filles continuant à laisser aux garçons les filières économiquement et socialement les plus valorisées sur le marché du travail". Avec pour résultat des pans entiers de l'économie -l'automobile, l'aéronautique, le spatial, le transport ferroviaire ou maritime, ou encore l'énergie - totalement déséquilibrés, où les femmes peinent à atteindre les 10 %.
À la question de savoir si des quotas sont nécessaires, Marie-Sophie Pawlak répond prudemment, tout en estimant que “c'est peut-être la seule façon pour que les hommes aillent chercher des talents féminins dans les couches inférieures de l'entreprise ; si on ne légifère pas, cela avance trop doucement". Autre levier, les actions en entreprise destinées à sensibiliser les hiérarchies masculines, mais aussi, et surtout, les formations destinées à apprendre aux femmes “à avoir de l'ambition, à se mettre en avant et à savoir se vendre".
Comment ce désir de mixité est-il perçu dans les entreprises d'aujourd'hui ? “Les RH de nos entreprises adhérentes sont plus que convaincues, mais nous sommes dans un travail de longue haleine. Il faut déjà que le nombre de candidates augmente", répond-elle. Et de délivrer cet encouragement pour celles qui n'oseraient pas inscrire leurs choix d'orientation en dehors des stéréotypes : “La tendance actuelle chez les industriels est de vouloir recruter des femmes, parce qu'il y a un avantage à avoir des équipes mixtes ; si elles postulent, elles sont reçues à bras ouverts, de belles carrières les attendent".
D'où l'intérêt du prochain événement programmé pour le dernier trimestre 2010, “un colloque sur l'ambition féminine", organisé en partenariat avec l'association Pascaline . S'adressant notamment aux fédérations de parents d'élèves, aux professeurs principaux et aux CIO, il s'agira-là de sensibiliser en amont la chaîne des acteurs de l'orientation.
Objectif "complémentarité"
“Ce que nous visons, c'est d'avoir dans les entreprises une mixité qui corresponde à la société et qui ne peut que servir l'efficacité des organisations." Comprendre qu'il ne s'agit pas d'opposer les femmes aux hommes, mais de revendiquer une complémentarité, source de valeur ajoutée. Des exemples ? Reconnaissant n'être pas loin du “préjugé", Marie-Sophie Pawlak assume des “styles de management" différents qui gagneraient à être “combinés" : peut-être plus “droit à l'objectif" pour les hommes quand les femmes se montreraient plus soucieuses “d'arrondir les angles ou de faire avancer l'équipe par consensus". Quant aux difficultés qui subsistent, par exemple celle qui fait qu' “une équipe de 50 hommes n'accepte pas toujours facilement d'être encadrée par une jeune diplômée", elles s'effaceront d'autant plus facilement que les femmes seront plus nombreuses au sein des équipes : “quand il n'y a que des hommes, on y pense à deux fois avant de promotionner des femmes sur des postes d'encadrement", résume-t-elle.)] [(
Elles bougent
L'association Elles Bougent regroupe plus de 1 600 lycéennes et étudiantes, près de 400 “marraines", 15 entreprises, 2 fédérations et 27 établissements d'enseignement supérieur.
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