Orientation - E-portfolio : retours d'usages par les jeunes de l'E2C Tours
Par Nicolas Deguerry - Le 16 mars 2011.
Présentée dans nos colonnes en septembre dernier[L'Inffo n° 774, p. 9. [/footnote], la formation-action “[Employabilité 2.0" s'est achevée le 27 janvier dernier. Un projet qui visait à l'appropriation collective de la démarche e-portfolio, à la fois par les professionnels de l'accompagnement[ 1 ]CIDFF, École de la deuxième chance, Entr'aide ouvrière, Bureau information jeunesse, Mission locale, Régie Plus, Afec, etc. et par le public final - des personnes faiblement qualifiées.
“Dans un contexte de crise économique et de difficultés d'entrée sur le marché du travail, rappelle Rémi Lévy, chef de projet Employabilité 2.0, la nécessité de valoriser chacune des expériences des personnes à faible qualification nous est apparue primordiale. C'est précisément l'objet des démarches portefeuilles de compétences, qui visent à mieux se connaître pour pouvoir se présenter et se décrire dans ses expériences, activités et capacités professionnelles."
Pourquoi le faire en ligne ? “Comme l'indique Wikipédia à propos des e-portfolios, prévient Rémi Lévy, il n'est pas question d'informatique, mais bien de méthodes de développement, de formation tout au long de la vie et de promotion de l'identité des personnes et des organisations." Et de souligner combien la démarche numérique est devenue “une nécessité liée à l'usage massif d'internet, et notamment des réseaux sociaux, qui impacte les logiques de recrutement : il est important d'apprendre à gérer sa présence sur internet et de se familiariser avec les possibilités de diffusion de son identité numérique".
Comment ce public cible a-t-il reçu la proposition qui lui était faite de se constituer un portefeuille de compétences sous format numérique, c'est ce que nous avons demandé à un groupe de jeunes arrivé à l'École de la deuxième chance de Tours en septembre 2010, en complément d'une enquête de satisfaction menée par les porteurs du projet.
Aux termes de cette dernière, il est intéressant de noter que 88 % des personnes ont appris qu'elles pouvaient mieux décrire leurs compétences, et 71 % découvert des expériences importantes qu'elles avaient oubliées. Des résultats positifs qui cadrent avec les objectifs annoncés, mais qui n'empêchent pas que le dispositif a parfois dérouté ces derniers. Si les réactions de rejet radical sont rares (“Cela ne m'a pas intéressé, je préfère la bonne vieille méthode : aller présenter moi-même mon CV à l'employeur, je préfère qu'il voit ma tête plutôt que ma photo", Quentin Capdequi, 20 ans), tous les témoins que nous avons interrogés ont fait part de leurs difficultés à projeter une utilisation de l'outil au-delà du contexte formatif. Ainsi d'Adeline Giry, 28 ans, qui nous déclare avoir “finalement vécu ça comme un plus", sans pour autant “penser à s'en resservir en sortant".
Évoquée pendant la formation, la question d'une utilisation publique ou privée du e-portfolio fait également débat : “Cela me paraît peut-être plus utile pour les créatifs qui peuvent s'en servir comme d'un book, mais en ce qui me concerne, je ne pense pas le rendre public, je pense plus le garder pour moi ou l'utiliser lors d'entretiens" (Perle Drocourt, 23 ans). Une réserve que l'on retrouve chez Lucol Delice, 26 ans, qui se destine aux métiers de bouche et à la restauration : “Cela peut être utile pour ceux qui ont une bonne expérience, mais personnellement je viens de débuter ma carrière. Ce sera peut-être plus avantageux après, pour évoluer. Et c'est peut-être plus intéressant pour les créateurs, par exemple les pâtissiers, qui peuvent en profiter pour montrer leur chef d'œuvre, une belle expérience à valoriser." Témoin de la fécondité de la démarche, Lucol Delice indique aussi avoir découvert qu'“en réalisant son e-portfolio, on creuse et on finit par trouver : j'ai par exemple pris conscience au cours de la formation que mes connaissances en herbologie pouvaient être valorisées professionnellement", conclut-elle.
Enseignement majeur de ces remarques pour Rémi Lévy, chef de projet, et Hervé Breton, consultant, la nécessité d'“accompagner le public cible à chaque étape, de l'appropriation technique des outils à la réflexion sur la démarche portefeuille de compétences".
Notes
1. | ↑ | CIDFF, École de la deuxième chance, Entr'aide ouvrière, Bureau information jeunesse, Mission locale, Régie Plus, Afec, etc. |