“Le retour aux métiers" : une stratégie pour les Universités d'entreprise en temps de crise

Par - Le 01 juin 2013.

Campus, Universités, Univer- Cités, Académies, Instituts, Learning Centers, Learning for Development, Learning Institutes… les dénominations passent, mais les Universités d'entreprise restent. On en compte désormais plus de 4 000 dans le monde (dont 70 associées à des groupes français) et elles participent au développement des orientations stratégiques et politiques des grands groupes. “Le retour aux métiers", c'est le leitmotiv qui semble les animer depuis 2008 et le début de la crise. Loin de la logique des années 90 (celle des grandes fusions- acquisitions) dont l'objectif était surtout de développer des cultures communes au sein de groupes aux activités parfois dissemblables (Vivendi-Universal), les Académies d'entreprise des années 2000-2010 sont revenues à certains fondamentaux. “Avec la crise, elles ont subi des reculs budgétaires", estimait Évelyne Deret, secrétaire générale du Comité mondial pour les apprentissages tout au long de la vie, le 18 avril dernier, à l'occasion de l'un des “jeudis" thématiques de l'Afref [ 1 ]Association française de réflexion et d'échange sur la formation. “Elles ont dû redéployer leurs activités
vers le développement stratégique." Un revirement également remarqué par Denis Reymond, trésorier de l'Afref et directeur practices management chez Demos : “À partir de 2009, les entreprises ont considéré leurs Universités internes comme un moyen d'optimiser le financement, en y regroupant les besoins individuels pour, ensuite, déployer les bonnes pratiques dans les directions opérationnelles."

Le cas Manpower

Car, s'il est une constante des Universités d'entreprise, c'est qu'au plan comptable, elles coûtent bien plus qu'elles ne rapportent. “Au-delà de l'image de marque, si les entreprises continuent à maintenir ces académies, c'est avant tout qu'elles sont liées aux questions d'emploi et d'intégration des personnes", considérait Thierry Cavaillé, directeur général des services de FutureSkill (marque spécialiste de la formation du géant de
l'intérim Manpower), pilote de
l'Université des talents du numérique et du digital. Manpower, d'ailleurs, a développé à la fois une “Université" et une “Académie". Double emploi ? Non, à en croire le dirigeant : si l'activité de la première est essentiellement consacrée à l'intégration de nouveaux collaborateurs, la seconde vise au développement d'une stratégie pour le groupe et se focalise sur les responsables d'agences d'intérim (600 sur le territoire français, formés par groupes de 100). “La constitution de groupes de cette taille permet un dynamisme dans les
échanges bien supérieur à ce que nous obtiendrions si nous devions les former en salle, au cours de séances restreintes à une douzaine de personnes", a expliqué Thierry Cavaillé. Plus dynamique, donc, mais aussi moins coûteux, puisque si l'Université dispense des formations de 400 heures par an pour des petits groupes de collaborateurs, l'académie permet de dispenser savoirs et bonnes pratiques à des communautés plus vastes, en moins d'une centaine d'heures annuelles. À cet effet, le groupe d'intérim a fait le choix de développer des contenus (vidéos, conférences, etc.) disponibles sur une plateforme LMS.

Les rattacher aux directions générales

Une règle, cependant, s'impose à tous les groupes qui souhaitent rendre pérennes leurs Universités d'entreprise, particulièrement en période de vaches maigres : “L'implication totale de la direction générale de l'entreprise à laquelle l'Université doit être rattachée", a souligné Évelyne Deret. Une opinion partagée par Thierry Cavaillé : “Sans soutien de la direction, l'Université d'entreprise peut vite se retrouver sous les tirs croisés des services financiers. Elle peut, de
fait, disparaître… ou devenir autre chose. Un certain nombre de soi-disant Universités ne sont, en réalité, qu'une jolie dénomination pour désigner le plan de formation ordinaire de l'entreprise"...

Notes   [ + ]

1. Association française de réflexion et d'échange sur la formation.