Les opérateurs de placement privés sur la sellette
Par Benjamin d'Alguerre - Le 16 février 2013.
C'est au milieu des années 2000 que l'ANPE (puis Pôle emploi, à partir de 2009) a commencé à recourir à la sous-traitance pour assurer l'accompagnement des demandeurs d'emploi. Après un premier rapport établi en 2008, les services de Pôle emploi, en collaboration avec la Dares, viennent de rendre publics les résultats d'une seconde observation de l'éventuelle plus-value des opérateurs de placement privés (OPP) dans l'accompagnement renfo rcé des chômeurs. Ces données concernent la période 2009-2011, au travers des deux dispositifs “Trajectoire emploi" (TRA) et “Licenciés économiques" (LEC), conçus pour deux types de publics (voir encadré).
Classifiés en fonction de leur spécialité
Le rapport 2007-2008 avait notifié un certain “effet d'aubaine" chez les OPP qui avaient alors orienté leurs politiques d'accompagnement vers les niveaux de qualification les plus élevés dont la réintégration dans l'emploi était plus rapide. Aussi, en 2009, les cahiers des charges de Pôle emploi ont été modifiés afin d'étendre l'action des opérateurs vers tous les demandeurs d'emploi concernés (proposant aux prestataires un principe de paiement aux résultats en trois versements, 50 % de la somme n'étant payée par Pôle emploi qu'en cas de succès dans le retour à l'emploi). Au total, une trentaine d'opérateurs privés ont agi sur l'une ou l'autre des prestations proposées et se sont vus classifiés en fonction de leur spécialité (OPP “reclassement", OPP “intérim" et OPP “formation").
In fine, si le contrôle qualité des prestations a été mesuré en fonction des cahiers des charges (évaluation à huit, treize et dix-huit mois après le lancement de l'opération), Pôle emploi reconnaît, dans son rapport final, s'être “peu penché sur la qualité de la prestation en tant que telle". De plus, les informations transmises par les OPP à leur commanditaire ont été généralement qualifiées d'“imprécises et peu illustrées", jusqu'à ce que l'introduction de nouveaux outils informatiques (en 2011) ne vienne affiner les retours du terrain.
Les OPP “formation" ont de meilleurs résultats
48 % des demandeurs d'emploi accompagnés au titre de TRA se sont estimés “satisfaits" de l'accompagnement dont ils ont bénéficié. À l'échéance des huit premiers mois, 38 % étaient à nouveau dans l'emploi (puis 45 % à treize mois et 49 % à dix-huit mois). En revanche, ils n'étaient que – respectivement – 23 %, 29 % et 33 % à avoir intégré un emploi durable (CDI, CDD de plus de six mois ou création d'entreprise), soit un taux inférieur de 5 à 8 points de pourcentage par rapport aux chômeurs directement accompagnés par Pôle emploi. Pour les licenciés économiques, ceux accompagnés par les OPP “formation" attestent d'un taux de retour à l'emploi supérieur à celui de leurs homologues accompagnés par les autres types d'OPP. En revanche, en dépit de ces résultats, la tendance est restée celle d'emplois retrouvés plus instables et moins rémunérateurs qu'avant l'épisode du chômage.
À suivre : le “paiement au résultat"
Le système de sous-traitance a donc montré ses limites, comme le souligne le rapport, notamment car les cahiers des charges n'ont pas permis une évaluation satisfaisante des savoir-faire et des compétences spécifiques dont disposent certains opérateurs privés. Aussi, dans les nouveaux marchés passés en 2012, Pôle emploi a souhaité remédier à ces limites grâce à un assouplissement du cahier des charges et à l'allongement de la durée des marchés (deux ans ayant été jugés trop courts pour l'optimisation des dispositifs).
Deux points particuliers feront d'ailleurs l'objet d'une réflexion au sein du service public de l'emploi : l'opportunité de recourir à une sous-traitance spécialisée et une importance accrue du “paiement au résultat" pour que le retour à l'emploi durable effectif des chômeurs colle au plus près aux résultats obtenus par le seul Pôle emploi.
“Trajectoire emploi" concernait les demandeurs d'emploi en difficulté d'insertion (perspectives d'emploi limitées au sein de leur territoire, CDD à répétition, intérim récurrent, etc.). Initialement prévu pour 220 000 d'entre eux, TRA a permis d'en accompagner 189 000 entre 2009 et 2012, bien que le dispositif ait été prolongé jusqu'en février 2012.
“Licenciés économiques", en revanche, était destiné au suivi des licenciés économiques bénéficiant d'une convention de reclassement personnalisée (CRP) ou de contrats de transition professionnelle (CTP), ces deux outils ayant, en 2012, été “fondus" dans l'actuel contrat de sécurisation professionnelle (CSP). 150 000 licenciés en ont bénéficié.