Quels investissements, pour intégrer dans l'entreprise les salariés en reconversion ?

Par - Le 16 octobre 2013.

La “mobilité professionnelle",
ou reconversion, voulue ou subie, ce
processus par lequel des personnes
changent de métier ou d'emploi,
semble être bien accompagnée
par les chefs d'entreprise et les
DRH. En effet, révèle une enquête [ 1 ]Enquête réalisée en ligne du 18 avril
au 14 mai 2013 auprès de 993 chefs
d'entreprise et DRH ayant eu un
contact avec des candidats qui se sont
reconvertis ou des salariés ayant un
projet de reconversion.
d'OpinionWay pour le Conseil
d'orientation pour l'emploi (COE),
lors du colloque annuel de cet
organisme placé auprès du Premier
ministre, le 26 septembre dernier [ 2 ]Les résultats ont été présentés
dans le cadre de la table ronde :
“Perspective : quels regards les salariés
et les employeurs portent-ils sur les
reconversions professionnelles ?"
,
“78 % des chefs d'entreprise ou
DRH ayant recruté des personnes
en reconversion mobilisent des
outils pour faciliter l'intégration
dans l'entreprise des salariés en
reconversion et leur appropriation
du métier". Les dispositifs utilisés :
le tutorat (40 %), les stages de
formation (29 %) et le “tuilage",
c'est-à-dire le fait que le nouveau
salarié est formé par la personne
qu'il doit remplacer (23 %).

Dans le cas d'une reconversion
externe volontaire, ce sont 77 %
des chefs d'entreprise ou DRH qui
fournissent un accompagnement
(conseil, entretien, etc.) au salarié
concerné. 74 % leur proposent
d'utiliser leur Dif et 60 % leur
communiquent un “kit d'information
sur les aides à la reconversion".
Lorsque celle-ci se déroule en
interne, 61 % des responsables
interrogés déclarent mobiliser un
bilan des compétences, 54 % du
tutorat, 53 % un bilan professionnel
et 48 % le Dif. Et de rappeler, en cette
année où les Fongecif célèbrent leur
trentième année d'existence, que le
congé individuel de formation est
“un merveilleux outil pour la mobilité
des personnes ayant un vrai projet
professionnel".

“Un travail difficile de la personne sur elle-même"

Yves Barou, président de l'Afpa, qui
a fait réaliser une enquête nationale
par l'institut Ifop, a modéré la portée
de ces résultats. Selon lui, “les
entreprises n'accompagnent pas
assez les salariés dans l'orientation
dans leur projet de reconversion
professionnelle. Il faut les orienter
plus efficacement en leur proposant
les bonnes formations".

Celles qui leur permettraient
de sécuriser leur parcours
professionnel, dans une situation
où l'employabilité à vie n'est plus
garantie. Il faut donc, au sein des
entreprises, pouvoir “anticiper les
progressions de carrières et ne pas
utiliser les outils comme de simples
pansements", a rappelé Catherine
Négroni, sociologue, maître de
conférences à l'Université de Lille-III,
qui a étudié, voici quelques années,
les itinéraires de personnes en
reconversion professionnelle. Selon
elle, ce processus est un “travail
difficile de la personne concernée
sur elle-même". Celle-ci doit non
seulement se prendre en charge
pour mener à bien son projet, mais
elle a besoin d'être efficacement
accompagnée avant et pendant.
Comme la sociologue, le psychologue
Jean Pralong, titulaire de la chaire
Nouvelles carrières à Rouen
Business School, est convaincu
de l'importance de “repenser un
nouveau mode d'accompagnement
tourné vers le long terme et non,
comme c'est actuellement le cas,
sur le court terme". Il serait utile,
a-t-il insisté, de mettre en place un
organisme, à l'instar de Pôle emploi,
qui “accompagnerait les personnes
dans leur processus de reconversion
professionnelle sur le long terme".
Car il n'est pas concevable qu'avec
un marché du travail aussi difficile,
l'on confie au salarié lui-même cette
démarche aussi complexe que sa
reconversion professionnelle.
Surtout, comme l'a rappelé Jean-
Christophe Sciberras, président
de l'Association nationale des
directeurs de ressources humaines
(ANDRH), s'inscrire dans cette
démarche, c'est “sauter dans le vide
sans parachute ni combinaison"...

Des moyens limités

Les chefs d'entreprise et les DRH
sont conscients des limites de
leurs actions. “Seuls 48 % des
responsables interrogés se disent
satisfaits des outils existants
pour accompagner les projets de
reconversion", a précisé Julien
Goarant, directeur d'études à
OpinionWay, qui présentait les
résultats de l'enquête. Parmi les
difficultés évoquées figure le
manque de fonds pour financer la
formation (34 %). “Ils souhaitent
un accompagnement renforcé des
personnes, tout au long du processus
de reconversion. Ils estiment être
trop souvent livrés à eux-mêmes
dans un dédale d'informations
qu'ils aimeraient voir regroupées
et simplifiées. Ils préfèreraient
davantage d'aides financières pour
les entreprises recrutant des salariés
en reconversion et une simplification
des démarches administratives." La
réforme de la formation en cours de
préparation prendra-t-elle en compte
ces souhaits ?

Les résultats ont été présentés
dans le cadre de la table ronde :
“Perspective : quels regards les salariés
et les employeurs portent-ils sur les
reconversions professionnelles ?"

Notes   [ + ]

1. Enquête réalisée en ligne du 18 avril
au 14 mai 2013 auprès de 993 chefs
d'entreprise et DRH ayant eu un
contact avec des candidats qui se sont
reconvertis ou des salariés ayant un
projet de reconversion.
2. Les résultats ont été présentés
dans le cadre de la table ronde :
“Perspective : quels regards les salariés
et les employeurs portent-ils sur les
reconversions professionnelles ?"