Yves Attou, président du Collectif des présidents
Par Nicolas Deguerry - Le 16 mars 2013.
“Je suis un enfant de la loi de 1971."
Mais qui est donc Yves Attou ?" Quand on rapporte au créateur du Comité mondial pour les apprentissages tout au long de la vie que sa personne intrigue, l'homme commence par esquisser un pas de côté : “Je ne suis pas très expansif, je n'ai pas une nature à m'exposer", tente-t-il. Raison de plus pour rencontrer celui qui s'efforce tout autant de sortir la formation du débat franco-français que de peser sur celui-ci. D'un côté, le Comité mondial créé en 2005 pour tenter d'incarner le rapport Delors sur l'éducation, de l'autre, le tout récent
Collectif des présidents pour l'amélioration de la formation professionnelle, créé pour peser sur le dialogue social. Objectif commun aux deux initiatives : se réunir autour d'une vision
humaniste de la formation.
Un homme engagé
Pour Alexandre Ginoyer, qui représente les entreprises au sein du Comité mondial, Yves Attou incarne “la ténacité dans un gant de velours" : en “grand manager soucieux de rassembler et surtout de ne pas exclure", l'homme sait décider “mais sans aucun autoritarisme et après avoir encouragé l'expression de la multiplicité des points de vue", estime-t-il. Et c'est bien ce “projet de rassemblement" qui le rend particulièrement pudique sur une autre dimension de sa personne. S'auto-décrivant comme “un enfant de la loi de 1971 et des apprentissages tout au long de la vie", Yves Attou aimerait bien en rester à l'itinéraire du passionné de formation qui ne voulait pas garder pour lui le “trésor caché dedans"… Sauf qu'au-delà du héraut
associatif, l'homme est aussi marqué d'un engagement à gauche. Réduit dans son CV à la mention d'un poste de conseiller technique au cabinet de Ségolène Royal, alors ministre déléguée chargée de l'Enseignement scolaire, il a cependant largement contribué à faire entrer la formation continue au PS en créant, avec Henri Weber, l'Université permanente des cadres et des militants. Volontiers fermée au nom de l'action oecuménique, la porte de l'engagement s'entrouvre néanmoins sans qu'il y ait trop besoin de glisser le pied dedans…
Demandez-lui ce que représente à ses yeux Jacques Delors, et la poche intérieure du costume libère aussitôt un agenda qui lui permet de citer sans erreur celui qu'il nomme “l'éclaireur" : entre des considérations sur “l'éducation tout au long de la vie [qui] sera l'une des clés d'entrée du XXIe siècle" et la nécessité d'“étendre la coopération internationale dans le village planète", c'est bien le credo du Comité mondial qui s'égrène.
Ingénieur social
Attardez-vous sur son parcours et vous verrez que l'homme a tout du pratiquant : “Dès que j'ai commencé à travailler, j'ai eu envie de me former et de prendre des responsabilités", souligne-t-il. Au pays du diplôme acquis en formation initiale pour le restant de ses jours, Yves Attou fait figure d'extraterrestre : s'il a atteint la retraite dans les services du Premier ministre, il rappelle volontiers avoir commencé comme maître auxiliaire d'éducation physique. Entre les deux, des expériences multiples et un souci permanent de formation continue. Aux années 1970 qui le voient “passer de la ressource physique à la ressource humaine", succède la “décennie Bertrand Schwartz". Celui-ci, “maître au même niveau que Delors", vient de remettre son rapport (1982). À l'instar de toute une génération, Yves Attou participe avec enthousiasme : président de la Mife et du Garf de l'Essonne, vice-président de l'InterMife, vice-président du Carif Île-de-France Ouest, président de la Mission locale d'Évry, secrétaire général du groupe d'étude parlementaire sur l'illettrisme… les dix années qui s'écoulent sont riches de mandats et s'achèvent sur un troisième cycle en gestion RH et développement territorial.
Comme souvent avec ceux qui n'ont pas commencé bardés de diplômes, Yves Attou paraît désormais insatiable et aborde les années 1990 sous le signe de la “bête à concours" : major du concours d'inspecteur de la formation professionnelle, deuxième au concours d'attaché d'administration centrale, admissible à l'Éna, il tente tout ce qui lui paraît à sa portée avec le souci de cultiver sa dimension de généraliste : “Personne n'arrive à me mettre dans une case, c'est intentionnel mais ce n'est pas un calcul, j'ai toujours été rebelle au cloisonnement."
Soit une vocation à abattre les frontières que le président de l'InterMife Gaston Paravy résume d'un mot : “Pragmatisme." Rappelant aussi qu'il avait très vite compris qu'“entre l'ANPE et l'Éducation nationale, il y avait quand même un large champ pour l'orientation des adultes qui n'était couvert par personne", le porte-drapeau de la guidance lui reconnaît sans hésiter une capacité à “tracer une voie nouvelle". Interrogé sur ses réseaux, Yves Attou se défend : “C'est un grand mot, réseau, je dirais plutôt contact…
Disons que j'ai peut-être une capacité à mettre en mouvement les personnes ou les groupes." Et de conclure : “On pourrait simplifier en disant que j'ai vraiment voulu être acteur : il y a ceux plutôt portés sur les affaires, moi, je pourrais dire que je suis un ingénieur social, passionné de formation."
1975 - Maîtrise d'éducation physique
1993 - Major du concours national d'inspecteur de la formation professionnelle
2013 - Président du Collectif des présidents