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L'école des métiers du pneu pour répondre aux besoins de Bridgestone

Par - Le 05 juillet 2018.

À Béthune, Bridgestone emploie près 1 100 personnes, permanents et intérimaires. Mais chez le numéro un mondial du pneu, tous les indicateurs n'ont pas toujours été au vert. Alors, lorsque la reprise s'est fait sentir, il a fallu réagir très vite. Sébastien Tranchant vient d'arriver comme nouveau directeur des ressources humaines. “À l'été 2016, nous avons senti la relance. Le carnet de commandes était rempli, les machines fonctionnaient bien, mais nous n'étions pas capables de produire nos 2 000 pneus tous les jours", se souvient-il.

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Il manque alors dix assembleurs pour réaliser la production quotidienne nécessaire. Le premier industriel de pneus se trouve à plus de 170 kilomètres. Trop loin pour disposer d'un vivier. “Contrairement à l'automobile où les ouvriers passent d'une usine à l'autre, d'un fabricant à un autre parce que ce sont les mêmes gestes, ici c'est un savoir très technique et des machines spécifiques", constate cet ancien de Toyota, à Valenciennes.

Faire face à l'urgence

L'usine ne parvient pas à trouver de demandeurs d'emploi qui puissent être opérationnels. Dans les équipes, le compagnonnage fonctionne mais cette transmission du savoir prend du temps, mobilise un ouvrier et sa machine. Et ce n'est pas la bonne solution face à une épidémie de grippe, un départ en congé, ou tout simplement le turnover naturel. Devant les besoins urgents, Sébastien Tranchant décide de créer sa propre école. Un petit “campus" au sein de l'usine, par lequel aujourd'hui, déjà une cinquantaine de personnes ont été formées au métier d'assembleur. D'autres postes devraient suivre à partir de mars 2018. Pour gérer les recrutements, trois personnes de l'agence d'intérim Randstad Inouse ont pris leurs quartiers dans les bureaux de Bridgestone.

La machine à côté des cahiers

Cet après-midi-là, dans un préfabriqué, la quatrième promotion composée de dix stagiaires suit un cours sur les nomenclatures. Bruno Desjardins, formateur sur des machines automatisées, est envoyé par l'Afpa d'Hazebrouck et rattaché à Bridgestone pour l'enseignement théorique. “C'est une solution formidable qui fait coïncider la théorie et la pratique très facilement. Il suffit d'ouvrir la porte pour tester la machine qui est juste à côté", s'enthousiasme-t-il. Et quelques minutes plus tard, les stagiaires sortent et commencent à travailler en binôme autour des machines, les mêmes que celles en vigueur dans le reste de l'usine. Jordan a 27 ans, et sort d'un BTS Conception et réalisation en chaudronnerie industrielle. Il retrouve certains points communs avec sa formation. “Je m'applique car je voudrais vraiment rester ici. C'est une belle entreprise. J'espère en tout cas avoir mon diplôme", explique-t-il.

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Contre la mauvaise image de l'industrie

À l'issue de cette formation, les stagiaires peuvent recevoir la qualification nationale “conducteur d'installation industrielle". Ils pourront aussi prétendre au certificat d'assembleur pneumatique. D'autres entreprises voisines se sont montrées intéressées : le producteur de surgelés McCain et l'industriel agroalimentaire Roquette comptent dans leurs effectifs des “conducteurs d'installation".
La motivation et le savoir-être constituent les critères principaux, reconnaît le DRH. “La plupart de ceux qui entrent ont un CAP, un BEP, ou un brevet des collèges, ou sont en École de la deuxième chance. Avant, l'usine cherchait des personnes avec des parcours industriels marqués. Désormais, un jeune sans expérience a toutes ses chances", explique Sébastien Tranchant. L'un des effets de cette nouvelle démarche est aussi la féminisation. Il y en a aujourd'hui une vingtaine, contre zéro en 2016. Dans ce cas, comme ailleurs, l'industrie souffre encore d'une trop mauvaise image.
“On imagine un endroit sale, des conditions difficiles, un côté charbon à notre métier. C'est faux, et c'est oublier la création, et la satisfaction de voir un produit fini", estime Fabrice Coulombel, responsable vulcanisation et qui manage les nouveaux formés dans sa partie assemblage. “Les gens ne se rendent pas assez compte que l'industrie a besoin de main-d'œuvre. C'est une réelle opportunité d'être formé ici."

Les stagiaires qui sont confirmés à leur poste ne diront pas le contraire, même dans l'odeur du pneu cuit. Le travail, rémunéré au rendement, tourne autour des 3 000 euros bruts pour un opérateur, à 33 heures par semaine et en 5/8.