Apprentissage : EdTech France saisit la justice
L'association EdTech France déposera dans les prochains jours un double recours, devant le Conseil d'État et le Conseil constitutionnel, contre le décret abaissant de 20 % le niveau de financement des formations en apprentissage dispensées à distance. Une première pour l'association, qui dénonce une décision aux conséquences économiques et symboliques majeures pour toute la filière.
Par Catherine Trocquemé - Le 07 juillet 2025.
Le dossier sensible de la prise en charge du distanciel en apprentissage franchit un nouveau cap. Pour la première fois, EdTech France engage un recours contentieux contre l'État. Au nom des acteurs de la filière numérique du secteur de l'éducation et de la formation, l'association conteste le décret instaurant, depuis le 1er juillet, une minoration de 20 % des niveaux de prise en charge pour les formations à distance. Une décision jugée lourde de conséquences. Sur le plan économique d'abord : cette baisse fragilise, voire menace la viabilité de nombreux organismes de formation ayant investi dans des modèles hybrides ou 100 % en ligne. Sur le plan politique ensuite : elle entérine une vision dépréciative du distanciel, perçu comme un modèle « low cost », supposé pouvoir absorber sans dommage une telle diminution de financement. Un signal jugé préoccupant par les acteurs de l'innovation pédagogique, qui y voient un précédent à la fois injuste et dangereux pour la dynamique de l'innovation (voir notre article).
L'Edtech muscle la défense des intérêts de la filière
Le dossier de recours, en cours de finalisation, s'appuie sur les arguments portés depuis plusieurs mois par l'écosystème de l'Edtech (voir notre article). Il s'enrichit désormais d'un volet juridique structuré autour de deux griefs principaux : « la violation du principe de sécurité juridique » en raison de l'absence de mesures transitoires et d'un cadre réglementaire stable ; et « la violation du principe d'égalité des libertés économiques » faute d'une analyse d'impact sur le secteur et du caractère arbitraire du montant de la minoration de 20%. EdTech France insiste notamment sur l'utilité sociale des CFA à distance qui sont soumis aux mêmes contraintes de régulation que les autres CFA, mais pénalisés dans leur financement. Au-delà de l'offensive juridique c'est un enjeu politique qui se dessine pour la jeune filière : être reconnue comme un acteur légitime et structurant du secteur de la formation. Il s'agit aussi d'ouvrir un débat de fond sur les modèles économiques du digital et leurs spécificités. « Cette initiative marque un tournant stratégique en établissant un rapport de force plus affirmé », souligne EdTech France. Une fois le recours déposé, le Conseil constitutionnel sera le premier à rendre sa décision d'ici trois mois.