Transposition de l'ANI du 25 juin : vers le retour d'une gestion paritaire de la formation

Le projet de loi « Senior », actuellement en cours d'adoption, transpose l'accord national interprofessionnel (ANI) relatif aux reconversions et transitions professionnelles. Il prévoit un renforcement du rôle de Certif Pro et la création d'un nouveau Conseil national pour la formation. Le Quotidien de la formation republie cet article rendu inaccessible pour des raisons techniques indépendantes de la volonté de la rédaction de Centre Inffo.

Par - Le 25 juillet 2025.

Chose promise, l'ANI du 25 juin doit être entériné par le projet de loi « portant transposition des accords nationaux interprofessionnels en faveur de l'emploi des salariés expérimentés et relatif à l'évolution du dialogue social ». Si l'essentiel des étapes a été franchies, il faudra attendre la rentrée pour sa lecture définitive par l'Assemblée nationale.

Mais l'avancement du texte permet d'ores et déjà de présumer des futures mesures qui viendront transformer la gouvernance de la formation. « L'objectif était de réintégrer une gestion paritaire sur le champ de la formation professionnelle. Nous nous sommes beaucoup battus [organisations patronales et organisations syndicales, ndlr] pour avoir une transposition correcte et surtout cohérente de cet accord », indique Eric Chevée, vice-président de la CPME en charge des affaires sociales.

Reconnaissance de la légitimité de Certif Pro

Le projet de loi va permettre de consacrer légalement Certif Pro, lui donnant une place similaire à celle des autres instances. « Il faut se souvenir que jusqu'ici Certif Pro était issue d'un ANI non retranscrit. J'ai l'habitude de dire [que l'association] était un club de boulistes, un ovni dans l'écosystème de formation, quelque part pas légitime. Même si Certif Pro avait trouvé une légitimité de fait dans ses missions et son rôle d'interface entre les 18 AT Pro et les partenaires institutionnels et politiques », explique Séverine Garandeau-Martin, secrétaire confédérale CFDT. Celle-ci connait très bien le sujet, pour co-présider actuellement l'association Certif Pro avec Matthieu Tezenas du Montcel (Medef). La représentante de la CFDT observe ainsi que les missions de coordination et d'animation des AT Pro confiées par la loi à la nouvelle instance s'inscrivent dans la continuité des travaux antérieurs. « Cela vient entériner la dynamique existante, où les territoires nourrissent le national et réciproquement », note-t-elle.

Gestion paritaire des fonds du PTP

« Pour autant, là où il y a un passage du gué, c'est sur la prise en charge par les partenaires sociaux des flux financiers [des projets de transition professionnelle - PTP] », ajoute Séverine Garandeau-Martin.  Le projet de loi prévoit désormais un transfert des fonds des PTP à Certif Pro, qui sera chargée d'en déterminer la répartition entre les AT Pro. La mesure, conforme aux dispositions de l'ANI, n'était initialement pas prévue par le projet de loi. Sa transposition a ainsi nécessité une réécriture en commission mixte paritaire ainsi qu'un amendement gouvernemental lors de la lecture définitive par le Sénat. « Cela a été obtenu de haute lutte. [Les partenaires sociaux] ont dû batailler ferme face à la techno-structure gouvernementale, Bercy en-tête, qui ne voulait pas entendre parler de ce que nous ayons une maîtrise de notre ligne budgétaire », explique Eric Chevée.

La mesure, qui nécessitera des changements statutaires et la création de nouveaux mécanismes financiers, n'entrera en vigueur qu'au 1er janvier 2028. « Tout est à construire, mais l'objectif est de garder la dynamique et la synergie entre national et territoires. […] Ce sera à Certif Pro de trouver des critères plus pertinents que les actuels, basés sur la masse salariale, et cela permettra de s'inscrire davantage dans une dimension de gestion paritaire que de gestion de dispositif », analyse Séverine Garandeau-Martin. On notera par ailleurs une autre échéance prévue au 1er janvier 2028 par le projet de loi : celle du transfert de France compétence à Certif Pro de la gestion du système d'information commun au réseau des AT Pro.

Création d'une nouvelle instance quadripartite

Le projet de loi prévoit enfin la création, au 1er janvier 2026, d'un « Conseil national de l'orientation et de la formation professionnelles pour le développement des compétences ». La structure, qui transpose la proposition de l'ANI du 25 juin de créer un « espace stratégique national », doit être composée de représentants de l'Etat, des régions, des organisations syndicales de salariés et des organisations patronales d'employeurs.

Ses missions, en lien avec le Conseil national de l'emploi (CNE), porteront à la fois sur la coordination et l'évaluation des politiques de formation professionnelle. « Nous souhaitions avoir un espace où discuter une fois par an, en étant détachés des contingences de la gestion quotidienne qui est celle de France compétences », explique Eric Chevée. Le projet de loi prévoit que le secrétariat du nouveau conseil national soit assuré par Certif Pro. Mais le représentant de la CPME souhaiterait, là aussi, que les partenaires sociaux soient encore plus étroitement associés à sa gestion. « Nous attendons de voir les décrets d'application, mais notre ambition est que ce conseil national ait une présidence et une co-présidence paritaire », indique-t-il.