« Nous voulons disposer de plus de fonds européens en gestion directe » (Renaud Muselier)

Quel est le rôle des régions dans la gestion des fonds européens structurels et d'investissement, notamment pour le FSE et le Feder ? Comment travaillent-elles avec la Commission et les acteurs nationaux et régionaux ? Quels sont les chantiers en cours ? Concernant le cadre financier pluriannuel pour la période 2021-2027 : quels sont les enjeux pour la Région ? Entretien avec Renaud Muselier, président de la Région Provence-Alpes-Côte d'Azur 

Par - Le 30 avril 2019.

Centre Inffo : Quel est le rôle des Régions dans la gestion des fonds européens structurels et d'investissement, notamment pour le FSE et le Feder ?

Renaud Muselier : Les Régions jouent aujourd'hui un rôle très important puisque ce sont elles qui, depuis la loi MAPTAM, gèrent les fonds européens, sur des programmes complets. La Région Sud est ainsi autorité de gestion de 4 programmes européens : le Feder FSE, le programme interrégional du Massif des Alpes, le programme de Développement Rural, et le programme transnational Interreg MEG. Ces 4 programmes que nous gérons représentent plus d'1,2 million d'euros de crédits européens qui nous permettent de cofinancer nos politiques régionales de l'emploi, de la formation, du développement économique, de l'innovation, de l'agriculture ou encore du développement durable. Ces fonds nous permettent aussi de soutenir les projets des acteurs du territoire, qu'il s'agisse d'entreprises, de collectivités territoriales ou de pôles de compétitivité.

Centre Inffo : Comment travaillent-elles avec la Commission et les acteurs nationaux et régionaux ?

Renaud Muselier : Nous travaillons en étroite collaboration avec la Commission Européenne. D'abord parce que nous devons lui rendre des comptes et répondre aux nombreux contrôles qu'elle diligente, mais aussi et surtout parce que la Région est un interlocuteur privilégié. Nous l'aidons à mettre en œuvre ses priorités politiques dans les territoires et à donner à son action plus de proximité. La Commission nous consulte régulièrement sur l'adoption de règlements européens, ou avant de lancer des appels à projets spécifiques. L'Europe sert si on sait s'en servir. C'est pourquoi j'ai toujours tenu à ce que la Région Sud soit très présente à Bruxelles pour peser sur les orientations de la Commission et faire en sorte que nos problématiques soient prises en compte dans les futurs appels à projet. J'ai d'ailleurs doublé les effectifs du bureau de notre représentation à Bruxelles, où nos équipes font un formidable travail de veille et de lobbying au sens noble du terme. La Région joue un véritable rôle d'interface auprès des acteurs du territoire, en les accompagnant, en les conseillant, en organisant des réunions thématiques pour qu'ils y répondent dans les meilleures conditions. Pour la période 2014-2020, ce sont ainsi plus de 3,3 milliards d'euros qui ont bénéficié aux acteurs de la Région. Ce travail de lobbying régional s'effectue à Bruxelles mais aussi au niveau national.

Pour les questions européennes, l'État s'appuie beaucoup sur l'Association des Régions de France qui apparaît comme une instance de dialogue et de concertation au quotidien entre l'État et les Régions.

C'est par exemple avec Régions de France que l'État prépare la future génération de fonds européens 2021-2027. En parallèle, chaque Région participe à de nombreux réseaux nationaux et internationaux pour faire entendre sa voix à Bruxelles.

Centre Inffo : Quels sont les chantiers en cours ?

Renaud Muselier : Le principal chantier concerne la future génération de programmes, et notamment les futures responsabilités des Régions. Pour le Feder, le rôle des Régions n'est pas remis en cause mais il reste de nombreuses incertitudes au sujet du FSE et du Feader notamment. Les régions attendent et agissent pour que l'État clarifie sa position. La volonté de l'État semble aller vers une recentralisation des fonds, ce qui est un non-sens historique et une garantie d'inefficacité comme en atteste la gestion calamiteuse des fonds de la PAC par l'État . Avec le Brexit, de nombreuses inquiétudes existent encore sur les contours du futur budget européen.

Nous sommes particulièrement attentifs à l'avenir de la politique de cohésion qui est une politique fondatrice de l'Union Européenne. Nous ne voulons pas qu'elle soit remise en cause. De nombreux sujets sont ouverts à Bruxelles sur l'architecture des futurs périmètres des fonds de cohésion, mais également sur le contour de la prochaine génération de fonds interrégionaux qui intéresse tout particulièrement notre Région.

Centre Inffo : Concernant le cadre financier pluriannuel pour la période 2021-2027 : quels sont enjeux pour la Région ?

Renaud Muselier : La Région a prouvé son savoir-faire dans la manière dont elle a su gérer la génération de fonds 2014-2020. Elle entend donc conserver ses prérogatives et continuer à œuvrer pour que les priorités européennes se concrétisent sur son territoire : une Europe plus intelligente, plus verte, plus connectée, plus sociale et plus proche des citoyens.

Nous voulons, pour cela, disposer de plus de fonds européens en gestion directe, pour mettre notre organisation et notre expertise au service des acteurs du territoire régional.

La Région a largement démontré sa capacité à gérer les fonds structurels et elle va aujourd'hui au-delà de ses responsabilités pour aider les acteurs de son territoire à bénéficier de l'ensemble des fonds européens disponibles. J'ai coutume de dire que nous aidons les porteurs de projets à « parler l'européen ».

Les Régions sont aujourd'hui bien identifiées à Bruxelles dans ce rôle et l'enjeu aujourd'hui est, je le répète, de faire en sorte que l'État français ne cède pas à la tentation de revenir en arrière en décidant de recentraliser des politiques que Bruxelles souhaite mettre en œuvre au plus près des citoyens.


Pour aller plus loin, lire le dossier à la une d'Inffo formation, le magazine des acteurs de la formation, consacré à la formation en Europe:

Inffo Formation n°965