Le 8 avril 2025, présentation du 6e baromètre de la formation et de l’emploi Centre Inffo / CSA. Avec Stéphane Rémy, sous-directeur des politiques de formation et de contrôle au ministère du Travail, Pascale Romenteau, directrice générale de Centre Inffo, Frédéric Ferrer, animateur, et Julie Gaillot, codirectrice de pôle chez CSA.
Le sentiment d'être bien informé sur la formation atteint son plus haut niveau (Baromètre Centre Inffo / CSA)
L'édition 2025 du baromètre CSA / Centre Inffo de la formation et de l'emploi confirme la confiance des actifs face aux mutations du travail et la croissance d'un sentiment de responsabilité individuelle face à la formation. Un focus sur l'intelligence artificielle révèle un mélange d'enthousiasme et de besoin de formation.
Par Nicolas Deguerry - Le 09 avril 2025.
Pour cette 6e édition, le baromètre se base sur une enquête réalisée auprès de 1 621 actifs français en février 2025. Trois thèmes principaux sont explorés : la formation professionnelle face aux mutations du travail, la reconversion professionnelle et l'intelligence artificielle.
Des individus-acteur
Avec une confiance dans l'avenir professionnel qui progresse légèrement en 2025 pour s'établir à 69 %, Julie Gaillot, codirectrice de pôle à l'Institut CSA, souligne qu'incertitudes et mutations du monde du travail ne semblent pas perturber une majorité de Français. Tous profils confondus, à peine plus d'un quart des actifs pensent que la responsabilité de la formation professionnelle continue incombe avant tout aux pouvoirs publics, aux branches professionnelles et aux entreprises, quand une très large majorité (74 %) estime qu'il s'agit là d'une responsabilité individuelle.
Pour Pascale Romenteau, directrice générale de Centre Inffo, c'est là le signe que « la loi de 2018 a gagné son pari » même si, elle le remarque, cela n'exclut pas un besoin d'accompagnement, jugé « normal » au regard de la complexité de l'écosystème. Rappelant la création du droit individuel à la formation en 2003, Stéphane Remy, sous-directeur des politiques de formation et du contrôle à la DGEFP (Délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle), inscrit lui ce sentiment de responsabilité individuelle dans le temps long des réformes. Il y voit aussi une légitimation du compte personnel de formation, dispositif d'accès à la formation qui consacre le rôle de l'individu-acteur. Pour autant, il rappelle aussi la responsabilité des employeurs, inscrite au code du Travail, qui vient selon lui souligner l'importance de la notion de « co-investissement. »
Des inégalités persistantes
Il faut aussi le noter, le succès de l'individu-acteur est tempéré par certains profils, tels que les demandeurs d'emploi (40 %) et les fonctionnaires (36 %), qui sont plus nombreux à réclamer l'implication des institutions. De même, 69 % de l'ensemble des actifs se déclarent suffisamment acteur de leur formation professionnelle continue, mais seulement 43 % des chômeurs et 59 % des 50 ans et +.
Pour 47 % des actifs, en baisse de 3 points par rapport à 2024, un projet de formation est envisagé dans les 12 prochains mois. Ce taux connait de fortes variations en fonction de l'âge (71 % chez les 18-24 ans, 60 % chez les 25-34), du secteur (61 % dans le BTP/construction) et du statut (86 % chez les actifs en reconversion professionnelle). En hausse de 10 points sur 5 ans, le sentiment d'être bien informé atteint son plus haut niveau (53 %). Mais il n'y a toujours pas d'égalité devant l'information et les plus de 35 ans et les demandeurs d'emploi « sont toujours ceux qui se sentent le moins bien informés », insiste Julie Gaillot. A contrario, « plus on est jeunes et plus le niveau d'employabilité est élevé, plus on se sent informé. »
L'enquête révèle aussi un déséquilibre dans la connaissance des dispositifs de formation. Apprentissage, bilan de compétences et VAE ont bien intégré le paysage, mais CEP et, surtout, Pro-A et CléA restent inconnus d'une majorité des actifs. Le top 3 des sources d'information est constitué des moteurs de recherche, de l'employeur et des sites internet spécialisés.
Moins de reconversions
Avec 18 % des actifs qui préparent une reconversion, c'est une baisse de 3 points qui s'observe par rapport à 2021. Mais l'intérêt pour la reconversion reste fort, souligne Maxime Duval, analyste d'études chez CSA interrogé en marge du webinaire, puisque « 36 % des actifs qui ne sont pas en reconversion envisagent de le faire dans un avenir proche, notamment dans un horizon de 2 à 5 ans. » Deux facteurs sont cités comme essentiels pour la réussite du projet : 62 % des actifs en reconversion ou en envisageant une plébiscitent l'accompagnement, et 61 % suivent, ont suivi ou vont suivre une formation.
L'IA, sujet familier mais…
L'enquête 2025 confirme les tendances observées depuis qu'OpenAI a donné le go du déploiement grand public des IA (intelligences artificielles) génératives. L'appropriation est rapide et massive. 97 % connaissent l'IA, 64 % se déclarent à l'aise. Ce confort varie toutefois fortement selon les tranches d'âge et les fonctions, « les moins de 35 ans et les cadres affichant un niveau d'aisance particulièrement élevé, avec 78 % et 71 % d'entre eux utilisant l'IA au quotidien dans leur environnement professionnel », observe l'expert CSA. Julie Gaillot le souligne également, ce sont 4 actifs sur 10 qui se sentent mal informés sur l'IA avec, là encore, une sur-représentation de certaines catégories dont les fonctionnaires, les demandeurs d'emploi, les seniors et les ruraux.
Besoin de formation
Du choix des outils à la maîtrise opérationnelle de l'IA, tous les sujets intéressent les sondés et le sentiment d'aisance n'exclut pas un souhait de formation exprimé par 72 % des répondants. Ils sont déjà près de 4 sur 10 à avoir bénéficié d'une formation et sont majoritairement enclins à souhaiter l'enrichissement de l'offre de formation. La question des usages adaptés à leur contexte professionnel semble dominer, avec 45% des répondants qui estiment qu'il manque des formations spécifiques à leur métier.
Signe d'une certaine lucidité, les répondants valident aussi bien les avantages attendus de l'IA (gains de temps et de productivité), que les risques potentiels (éthique, dépendance, qualité du travail et des interactions humaines). Stéphane Remy s'en félicite, « une demande générale de lien social et humain » cohabite avec l'appropriation massive de l'IA.
- Télécharger l'édition 2025 du baromètre de la formation et de l'emploi (Centre Inffo / CSA) :
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