Patronat et syndicats en désaccord sur la co-construction du CPF

« Révéler le marché des abondements au compte personnel de formation, ouvrir à une grande fluidité financière, pour répondre aux enjeux de co-construction ». Telle est la vision de Stéphane Heit, qui a négocié pour la CPME le texte visant à rénover la loi « avenir professionnel », sur la base de 17 propositions. Cette co-construction doit être « définie et encadrée par des accords-cadres de branche », estime pour sa part le chef de file de Force ouvrière, Michel Beaugas.

Par - Le 05 décembre 2022.

Vice-président de la CPME en charge de formation professionnelle, Stéphane Heit porte un regard positif sur la négociation interprofessionnelle et son aboutissement provisoire, en attendant d'éventuelles signatures les 5 ou 6 décembre : « Beaucoup d'idées sont partagées. Le travail a eu lieu dans une bonne ambiance. Ce texte sera remis à la ministre de la Formation professionnelle Carole Grandjean, qui est à l'écoute ».

Fluidité financière

Sur la gestion des abondements au compte personnel de formation, le vice-président de la CPME en charge de formation professionnelle, Stéphane Heit, estime indispensable de « révéler le marché des abondements, ouvrir à une grande fluidité financière, pour répondre aux enjeux de co-construction. On ne peut pas se retrouver bloqué. C'est une question d'intérêt général, de logique gagnant-gagnant ».

Effet de levier

Concernant les propositions fiscales et comptables, « nous savons qu'il y a une vraie difficulté avec Bercy et avec l'état des finances publiques. Mais il a semblé important aux partenaires sociaux d'en discuter et de porter cette question pour agir, car l'effet de levier pourrait être considérable ». Ces crédits d'impôts auraient-ils un poids si important pour les finances publiques ? « Pas sûr, il faudra faire des simulations. Quant aux normes comptables internationales nous savons bien le problème qu'elles posent. Mais nous aimerions travailler avec l'État dans une optique franco-française ».

Efficience du système

Certaines confédérations syndicales reprochent aux syndicats d'employeurs de ne pas mettre plus de fonds sur la table pour la formation professionnelle. « Regardons déjà les réallocations possibles vers plus d'efficacité », défend Stéphane Heit. « Ensuite, regardons la réalité de la crise énergétique, des menaces de dépôts de bilan, des chutes de trésorerie…. Nous sommes contre toute hausse des contributions sans démontrer l'efficience de l'actuel niveau de financement ».

Rien sur les qualifications, tout sur les compétences (FO)

Secrétaire confédéral en charge de la formation professionnelle au sein de Force ouvrière, Michel Beaugas juge « décevantes » les 17 propositions sur la formation professionnelle. « Ce ne sont les nôtres ! Malgré nos propositions, le patronat a renoncé à avoir notre signature, sans doute parce qu'il a reçu d'autres garanties par ailleurs », résume-t-il. Dans ce texte, argumente-t-il, « il n'y a rien sur les qualifications, il y en a que pour les compétences, les salariés sont oubliés, et ils n'ont pas de droit nouveau ».

CPF, éviter l'accord forcé du salarié

Sur le CPF et la co-construction et le co-investissement, Force ouvrière ne se dit pas « défavorable d'entrée de jeu, mais nous souhaiterions que cette co-construction soit a minima définie et encadrée par des accords-cadres de branche, puis que les discussions aient lieu en entreprises ». Sans accord cadre de branche, « on risque de constater que se fait n'importe quoi, comme c'est parfois déjà le cas. Nous souhaitons éviter l'accord forcé du salarié, dans un pseudo rapport de gré à gré. Nous souhaitons éviter le vol de CPF ».

Michel Beaugas doute de la pertinence de la démarche : « la première proposition intime à la Caisse des dépôts et consignations, c'est à dire à l'État, de bouger sur le système de gestion des abondements : est-ce la bonne méthode pour fonctionner et travailler avec elle ? ».

Rénovation de la gouvernance

Les seules propositions « qui nous semblent vraiment positives, ce sont celles concernant la rénovation de la gouvernance. C'est important, il faut un lieu d'échange stratégique, où remonteraient les informations, les analyses des observatoires de branches », tempère le dirigeant de FO.

Propositions inabouties

Pour le négociateur de la CFE-CGC, le texte des 17 propositions n'est pas à la hauteur des enjeux et défis. « Il y a quelques bonnes idées mais elles ne sont pas du tout abouties », affirme Jean-François Foucard, secrétaire national formation professionnelle de la CFE-CGC. « Ces propositions demandent en fait à l'Etat de faire des choses et nous pas grand-chose. En fait, la partie patronale ne veut pas s'engager. Qu'est-ce que la ministre va faire de tout cela, alors que l'on connaît l'importance des enjeux ? Faut-il signer la lettre d'accompagnement ? Pour ma part il n'y a pas à signer ce qui ne sert à rien. »