Lors de la biennale organisée par Euroguidance, Europass et le cadre européen des certifications, le 6 novembre 2025 au lycée la Folie Saint James à Neuilly-sur-Seine.

« Du prometteur au dystopique, aucun scénario n'est inéluctable »

Le Cedefop (Centre européen pour le développement de la formation professionnelle) s'est lancé dans un travail prospectif à long terme pour imaginer les futurs possibles de l'enseignement et la formation professionnels à l'horizon 2040.

Par - Le 10 novembre 2025.

Comment le travail de prospective sur l'avenir du monde du travail peut-il permettre d'améliorer les systèmes de formations ? Lors de la biennale organisée par Euroguidance, Europass et le cadre européen des certifications jeudi 6 novembre, Ramona David, experte du Cedefop sur l'analyse des politiques et de la recherche dans le domaine de l'éducation et de la formation est venue expliquer les travaux de l'agence européenne en matière de prospective : depuis sa création en 1975, le Cedefop a un rôle de « coordination » pour rendre les systèmes de formations plus cohérents afin qu'ils répondent au mieux aux besoins du marché du travail. Pour y parvenir, il est nécessaire « d'anticiper les besoins en qualification ». Depuis plus de 20 ans, « le Cedefop travaille sur le champ de l'anticipation » notamment par le biais de son « skills forecast », qui analyse les évolutions du marché du travail dans les pays européens. Mais, remarque Romana David, « à l'époque, les changements étaient moins rapides, moins imprévisibles et semblaient plus maitrisables ».

Futurs possibles à plus long terme

Pour aller plus loin, le Cedefop a commencé il y a environ 4 ans à compléter ce travail par un autre de prospective. C'est-à-dire, au lieu d'estimer le futur « probable » à moyen terme (5 ou 10 ans), d'imaginer des futurs possibles à plus long terme (10 ou 20 ans). Alors que le travail d'anticipation à moyen terme se fonde sur des données quantifiables (croissance économiques, départ en retraite, remplacement…), le travail prospectif « étudie plusieurs futurs possibles dans une exercice qualitatif et participatif ». L'idée n'est pas de « prédire » mais de « penser l'avenir » en « construisant des visions partagées ».

Futur de la formation professionnelle à l'horizon 2040

Ainsi, avec des experts, le Cedefop s'est appliqué à imaginer le futur de l'enseignement et la formation professionnels à l'horizon 2040. Cet exercice a été mené en plusieurs étapes : « d'abord, nous avons identifié 21 tendances structurantes », celles qui vont influencer la formation, comme l'émergence de l'IA, une tendance « centrale ». Ensuite ces tendances ont été analysées selon deux critères : le niveau d'importance et le degré d'incertitude. En effet pour certaines tendances il est difficile de savoir si l'impact sera majeur ou non, et à quelle échéance.

Trajectoires d'évolution des tendances

Puis le Cedefop a estimé des trajectoires d'évolution des tendances. Par exemple, est-ce que l'IA sera plutôt génératrice ou destructrice d'emploi, est-ce que les transformations du travail qui y sont liées seront substantielles ou modérées… En croisant l'évolution des tendances entre elles, le Cedefop a émis quatre scénarios : le premier, souhaitable, promet un avenir plein d'opportunités, ou la formation est accessible à tous, largement digitalisée et personnalisée. Le deuxième se caractérise par un laisser faire, où l'accès aux compétences dépend des ressources personnelles, ce qui crée une société à deux vitesses. Le troisième est celui de la stabilité lente, où la formation progresse peu et personne ne se saisit des opportunités. Et enfin le dernier est la forme « dystopique » de l'exercice, où la formation et l'avenir de chacun est laissé à la gouvernance d'algorithmes obscurs. La formation est devenue un service marchand, réservé à une élite hautement qualifiée. « Du prometteur au dystopique, aucun scénario n'est inéluctable, insiste Ramona David. La question n'est pas de savoir quel avenir nous attend, mais lequel nous voulons construire. »

 

Pour aller plus loin, lire le dossier à la une de notre magazine Inffo formation.