Débat sur le travail et les retraites, organisé le 25 juin par la revue L’Hémicycle en partenariat avec le Groupe Alpha, avec Arnaud Muret, directeur général de l’Opco EP.
« Effondrement des compétences dans les entreprises de 50 à 300 salariés » (Arnaud Muret, Opco EP)
Former les salariés est nécessaire pour maintenir les salariés de plus en plus longtemps en emploi. La suppression du plan de formation a retiré un outil aux entreprises, que le compte personnel de formation ne remplace pas, ont estimé les participants à un débat organisé par la revue L'Hémicycle. Quant aux entités de 50 à 300 salariés, leur niveau de compétences s'est effondré, a estimé le directeur général d'Opco EP, Arnaud Muret.
Par Emmanuel Franck - Le 01 juillet 2025.
« La retraite est la fin d'un parcours qui requestionne le parcours professionnel ». A l'occasion d'un débat sur le travail et les retraites, organisé le 25 juin par la revue L'Hémicycle en partenariat avec le Groupe Alpha, Arnaud Muret, directeur général de l'opérateur de compétences EP (entreprises de proximité), tisse le lien entre la retraite, le travail, et les compétences nécessaires pour le conserver longtemps. En quatre décennies, la durée de vie des compétences a diminué, constate-t-il. « Les compétences acquises par un ingénieur dans les années 1980 lui servaient 30 ans ; 2,7 ans aujourd'hui ». D'autre part, la pénibilité, sur laquelle les négociateurs de la réforme des retraites n'ont pas réussi à se mettre d'accord, pose la question de la « réorientation par le renouvellement des compétences », explique le directeur d'Opco.
Les entreprises forment davantage leurs quinquas
Président du Cercle des économistes, Jean-Hervé Lorenzi diagnostique quant à lui qu'« on ne travaille pas assez en France » pour équilibrer le budget du pays. Il identifie plusieurs obstacles qui réduisent « l'envie de travail », notamment une formation professionnelle « pas assez importante », comparée au Danemark, où « la population est en permanence en formation ».
Le constat partagé par les débatteurs est donc qu'il faut former les salariés pour maintenir leurs compétences, faciliter leur reconversion professionnelle, et, in fine, augmenter la quantité de travail nécessaire au financement de notre protection sociale. Ce levier est-il utilisé ? Certes, « des salariés de plus de 50 ans partent aujourd'hui en formation, alors que ce n'était pas le cas il y a 10 ans », témoigne Arnaud Muret. Et « des entreprises recommencent à former des ingénieurs maison en réponse à la pénurie de main d'œuvre », constate de son côté Emmanuel Lechypre, journaliste économique.
Perte d'un outil stratégique pour les entreprises
Mais « on a dévoyé l'allocation des moyens pour la formation professionnelle en supprimant le plan de formation. Les entreprises ont maintenant des problèmes pour reconvertir leurs salariés », regrette François Hommeril, président de la CFE-CGC. De son côté, Arnaud Muret constate un « effondrement des compétences dans les entreprises de 50 à 300 salariés », depuis que la réforme de la formation de 2018 a fléché les fonds vers les entreprises de moins de 50 salariés. Il craint une « catastrophe dans trois ou quatre ans » si on ne réinjecte pas des fonds dans la formation des premières.
Or le compte personnel de formation (CPF) ne peut pas tenir le rôle du plan de formation. Avec leur CPF, « les salariés se forment en langues et passaient leur permis de conduire », regrette Arnaud Muret. Nouvelle présidente du Groupe Alpha, Estelle Sauvat rappelle que le CPF avait pour rôle de déconstruire l'idée que la formation était « gratuite » et d'ouvrir la voie aux « co-financements », mais qu'il n'est « pas adapté aux reconversions professionnelles de masse ». En même temps qu'ils échouaient sur les retraites, les partenaires sociaux sont parvenus à un accord sur les reconversions professionnelles qui prévoit une reprise en main partielle du CPF par les entreprises.