Anna Gallotti, coach certifiée ICF, co-présidente du comité IA de la Fédération internationale du coaching.

IA : quel impact sur le coaching ?

Comment l'intelligence artificielle impacte-t-elle les pratiques professionnelles ? Pour sortir des généralités, focus sur le déploiement de l'IA dans le secteur du coaching avec Anna Gallotti, coach certifiée ICF et co-présidente du Comité IA éponyme.

Par - Le 27 juin 2025.

Cela peut paraître paradoxal mais c'est un fait : les systèmes d'intelligence artificielle, pourtant dénués d'émotions comme de sentiments, sont de plus en plus utilisés dans le champ de l'accompagnement. Qu'en est-il dans le secteur du coaching ? L'ICF, la fédération internationale du coaching, l'affirme : « une révolution est en marche » : « automatisation de tâches, analyse de données complexes et feedbacks instantanés » sont autant d'atouts de l'IA qui viendraient permettre aux coachs de « se concentrer sur l'essentiel, l'accompagnement humain et personnalisé de leurs clients. »

Un outil, pas un concurrent

Alors, à la question du potentiel remplacement des coachs par des IA, Anna Gallotti sourit. Le conseil de la co-présidente du Comité IA de l'ICF ? « Ne rentrez pas en compétition avec l'IA ! » Non pas qu'il faille leur céder la place mais plutôt que l'avenir est à la collaboration. Sur des tâches de transcription ou de production de rapports comme sur la recherche de contenus ou l'assistance à la conception de sessions, il est selon elle déjà risqué, et le sera plus encore demain, de se passer de l'IA. Mais même si des « chatbots clonés à partir des meilleurs coachs » sont déjà en activité, Anna Galloti tempère le risque d'une substitution à 100 % en soulignant l'importance des interactions sociales humaines. Certes, les IA s'expriment avec « gentillesse », mais Anna Gallotti n'y voit pas que des avantages. Elle en est convaincue, les émotions jouent un rôle pédagogique essentiel. « Le coaching humain, avec toutes ses imperfections, permet d'apprendre à gérer la frustration, nécessaire pour développer la résilience », affirme-t-elle.

Et de mettre en garde les nombreux jeunes et adultes qui tentent de combattre la « crise de la solitude » par des conversations avec ChatGPT. À trop valoriser l'empathie sans aborder l'intérêt d'une « frustration constructive » issue de la confrontation avec l'humain, c'est finalement la progression du coaché et la construction de son autonomie qui se verraient freinées. Anna Gallotti insiste, « il faut aussi apprendre à gérer les désaccords » pour être capable d'affronter le monde réel. Enfin, c'est aussi le slogan historique de la digitalisation des apprentissages – « Où je veux, quand je veux » -, qui se trouve questionné. Le coach n'est pas disponible 24/24 est c'est tant mieux, estime Anna Gallotti. Car se trouve là aussi dans ces contingences matérielles une source de frustration qui n'est pas que négative : apprendre à temporiser et réfléchir par soi-même lors des intersessions n'est pas du temps perdu !

Impact sur la formation

Pour autant, l'IA progresse et interroge la professionnalisation des coachs. Bien qu'il n'y ait pas aujourd'hui de mouvement unifié de refonte des référentiels de formation sous l'impact de l'IA, les centres de formation au coaching sont de plus en plus nombreux à intégrer des modules dédiés à l'IA. Ainsi par exemple du Group Coaching Institute d'Anna Gallotti, qui présente les outils de l'IA et propose des ateliers et conférences dédiés aux usages. Dans cette phase de découverte, plutôt que de paniquer, Anna Gallotti invite à distinguer quantitatif et qualitatif pour prendre conscience de la valeur ajoutée de la relation humaine. « L'IA force les coachs à travailler leur capacité à se synchroniser avec les clients de manière humaine, mais en même temps, à les challenger. »

Si l'enregistrement des sessions de coaching est utile pour la transcription et l'analyse des échanges, libre à chacun de positionner où bon lui semble le curseur du recours à l'IA. « Personnellement, je n'enregistre jamais mes sessions car cela peut être un facteur d'inhibition pour les coachs comme pour les coachés », illustre-t-elle. Mais quelle que soit la posture, elle souligne que l'essentiel est de conserver une éthique de pratique et de veiller à choisir des outils respectueux du cadre européen défini par l'IA Act.

Alors que les solutions technologiques évoluent à marche forcée, Anna Gallotti pointe aussi l'importance de la formation continue et rappelle que chez ICF, le renouvellement de la certification – obligatoire tous les 3 ans – implique de prouver que l'on a suivi au moins 40 heures de formation sur la période.

À bon entendeur, ICF France organise ses journées de professionnalisation 2025 les 5 et 6 novembre prochains à Marseille sur le thème : « L'IA, alliée ou défi ? S'ouvrir au coaching de demain ». En savoir plus : coachfederation.fr/jpro-2025-lia-alliee-ou-defi-reinventer-le-coaching-pour-demain/

COMITÉ IA ICF
Co-présidé par Anna Gallotti, le Comité IA est le groupe de travail d'ICF dédié à l'intelligence artificielle. Créé il y a deux ans avec l'objectif d'alimenter une réflexion experte et de produire des recommandations de bonnes pratiques, le Comité IA bénéficie depuis mars 2025 d'une directrice de l'intelligence artificielle à temps plein en la personne de Susan Caesar. À charge pour elle de piloter la réflexion, de fédérer les initiatives dans le secteur du coaching IA et d'organiser l'activité de formation. Une première conférence aura lieu le 24 juillet 2025.