La Première ministre a dévoilé les orientations de sa réforme des retraites, le 10 janvier 2023.

Retraite : un congé de reconversion pour les salariés qui exercent un métier difficile

Avec le recul progressif de l'âge légal de départ à la retraite, mesure phare de la réforme présentée par le gouvernement le 10 janvier, le sujet des transitions professionnelles devient crucial. Pour les salariés exerçant un métier difficile, un congé de reconversion sera créé dans le cadre du compte professionnel de prévention (C2P). Et un « index seniors » sera instauré pour inciter les employeurs à s'emparer de la question du maintien dans l'emploi des salariés en fin de carrière.  

Par - Le 12 janvier 2023.

Dévoilé par la Première ministre Elisabeth Borne, le 10 janvier, le projet de réforme des retraites comporte des dispositions structurantes pour préserver l'équilibre du système. L'âge légal de départ à la retraite passera ainsi progressivement de 62 à 64 ans d'ici à 2030 et l'allongement de la durée de cotisation prévu en 2035 sera avancé à 2027. Ces changements qui amèneront à travailler plus longtemps sont assortis de mesures destinées à protéger certains publics avec pour objectif de construire un « système juste ». Sont concernés notamment les personnes qui ont commencé à travailler tôt où celles qui sont exposés à des risques professionnels. « Nous devons prendre en considération l'usure professionnelle liée aux conditions d'exercice de certains métiers », a souligné Elisabeth Borne.

Réorienter les salariés qui exercent des métiers pénibles

Ainsi le compte professionnel de prévention (C2P) conçu pour permettre aux personnes exposées à des risques professionnels de financer une formation, de passer à temps partiel ou de bénéficier d'un départ à la retraite anticipé va évoluer. Les critères d'acquisition de points seront modifiés ce qui permettra, chaque année, à plus de 60 000 personnes supplémentaires de bénéficier du dispositif. D'autre part, les droits à la formation acquis au titre du C2P seront renforcés : un point ouvrira un droit de 500 euros contre 375 aujourd'hui. Et un congé de reconversion sera créé pour permettre aux titulaires « de s'orienter vers des métiers moins exposés aux risques », a précisé Olivier Dussopt, le ministre du Travail. Ce droit à la reconversion permettra de financer des parcours longs et qualifiants avec maintien de la rémunération, une mesure essentielle pour lever les freins à l'entrée en formation.

Un fonds pour financer des actions de prévention

Le gouvernement compte aussi agir sur la prévention de l'usure professionnelle en créant un fonds d'investissement doté d'un milliard d'euros sur cinq ans. Financé par la branche accidents du travail et maladies professionnelles de la sécurité sociale, ce fonds permettra de mettre en place des actions de sensibilisation, de prévention, de formation et de reconversion pour des salariés exerçant des métiers difficiles. Les branches professionnelles recenseront avec la sécurité sociale, les métiers concernés.

Emploi des seniors, appel à la mobilisation des entreprises

De manière plus générale, le recul de l'âge de départ à la retraite soulève des questions sur l'organisation des fins de carrière et sur l'emploi des seniors. Des sujets dont s'empare le gouvernement à travers des dispositifs destinés à faciliter les transitions entre l'activité et la retraite mais aussi en incitant les entreprises à agir. La France est « un des pays d'Europe où la part des personnes de 60 à 64 ans qui travaillent est la plus faible », rappelle Elisabeth Borne. Une situation qui est, selon elle, « trop souvent le fait d'une pratique abusive et – disons-le – discriminatoire, qui consiste à faire partir les salariés quelques années avant leur retraite ». Pour la Première ministre, « les entreprises doivent faire leur place aux personnes proches de la retraite et veiller à veiller à une meilleure qualité de vie au travail. »

Un index seniors pour inciter à agir

Pour les inciter à aller dans ce sens, le gouvernement va instaurer un « index seniors ». Cet outil doit permettre de « valoriser les bonnes pratiques et dénoncer les mauvaises ». La publication des résultats sera obligatoire pour les entreprises de plus de 1 000 salariés dès cette année et à partir de 2024 pour les plus de 300. A défaut de publication, les employeurs risquent des sanctions financières dont le montant reste à définir. Cet index sera aussi un outil de référence, dans le cadre du dialogue social, sachant que l'emploi des seniors deviendra un sujet obligatoire dans le cadre de la négociation sur la gestion des emplois et des parcours professionnels (GEPP) imposée aux entreprises de plus de 300 salariés.

Un sujet qui reste ouvert

La balle est dans le camp des entreprises. A ce stade, le projet du gouvernement ne prévoit pas de mesures spécifiques pour soutenir la formation ou le recrutement des seniors. Certaines organisations le regrettent comme l'Union des entreprises de l'économie sociale et solidaire (Udes) qui juge « insuffisantes » les mesures en faveur de l'emploi des seniors. Mais la première ministre se dit prête à poursuive les échanges sur ce sujet et « à continuer à réfléchir avec les partenaires sociaux à la façon de donner toute leur place aux seniors dans l'entreprise. » Le projet sera présenté en conseil des ministres le 23 janvier.