Financement de la formation professionnelle : il n'y a pas que l'État
L'État réduisant les dépenses liées à la formation professionnelle, quelles solutions alternatives existent pour favoriser le développement des compétences ? Lors de son Université de printemps, l'Association pour l'accompagnement et le développement des compétences (Adevcomp) a fait le point sur les possibilités d'abondement du compte personnel de formation (CPF) et sur les fonds conventionnels...
Par Emmanuel Franck - Le 07 mai 2025.
Réduction des aides publiques à l'apprentissage ; suppression des fonds propres de France VAE ; activité partielle longue durée-rebond (APLD-R) pour l'heure sans soutien du fond national emploi (FNE) ; disparition programmée des dispositifs Transco et Pro-A... Quand l'État réduit ses dépenses de formation professionnelle, comment susciter des financements alternatifs ? Les acteurs invités à l'Université de printemps organisée le 23 avril par l'Association pour l'accompagnement et le développement des compétences (Adevcomp) ont partagé leurs pratiques.
Cofinancement du CPF
Le compte personnel de formation (CPF) est un capital à la main du salarié mais mobilisable pour des projets de formation collectifs moyennant un abondement. Lætitia Grillère, chargée de mission ingénierie de la certification professionnelle et des compétences à l'Institut national des sciences et techniques nucléaires (INSTN), expose ainsi le cas d'Orano (ex-Areva), qui « veut que ses salariés utilisent leur CPF » pour se former à un titre de technicien supérieur en radio-protection par validation des acquis de leur expérience (VAE). L'INSTN, qui est certificateur et organisme de formation, « travaille sur une dotation volontaire de l'entreprise », dont le moment reste à définir, et qui serait donc fléchée vers le titre en question. Un accord collectif est en préparation.
Des abondements sécurisés
Depuis un décret du 14 avril, il est possible d'imposer au titulaire du CPF d'utiliser l'abondement versé par une entreprise, une branche, une Région, ou l'État pour une formation précise, dans un certain délai et de lui demander de rembourser ce qui n'aura pas été utilisé. Le remboursement n'est pas encore opérationnel car « compliqué » à mettre en œuvre par la Caisse des dépôts, signale toutefois Olivier Phélip, directeur général d'Uniformation, l'Opco de la cohésion sociale. Moyennant ce bémol, il estime que ce décret « va sécuriser les investissements des entreprises » en fléchant l'utilisation du CPF abondé. Certaines branches d'Uniformation abondent par exemple les CPF des salariés à temps partiel, ou remboursent les entreprises qui ont abondé, rapporte Olivier Phélip. Lætitia Grillère indique que la Région Pays de la Loire vient de décider d'abonder le CPF des demandeurs d'emploi ligériens pour qu'ils s'orientent vers des formations de niveau 5 à 7, pour les métiers en tension et liés à la transition écologique, dont les métiers du nucléaire.
Une solution qui ne répond pas à tous les cas de figure
Abondé ou non, le CPF n'est pas la solution miracle à la baisse des financements étatiques. Cyril Baraban, directeur général d'Initiactive, association accompagnant des créateurs d'entreprise financée par des fonds publics, signale que le CPF n'est pas adapté aux besoins des chefs d'entreprise, qui « ont besoin de formations courtes » quand le CPF est réservé aux formations certifiantes. Autres bémols évoqués : « les règles changent souvent, je passe beaucoup de temps à faire de la veille », explique de son côté Lætitia Grillère. Et « le montant des abondements est modeste », rapporte Olivier Phélip.
Les entreprises mettent la main à la poche
Autre alternative : la mobilisation des branches professionnelles. Olivier Phélip rappelle que les versements conventionnels ont permis le financement de la VAE des salariés de la branche des soins, alors même que France VAE ne distribue plus un euro. Un projet rendu possible parce que les entreprises de la branche ont accepté de payer. La pratique des versements conventionnels est répandue dans les branches qui relèvent du périmètre d'Uniformation, « par besoin de souplesse et de stabilité alors que l'État change les règles », comme c'est le cas actuellement, explique Olivier Phélip. D'une manière générale, « pour un Opco qui ne compterait que sur les deniers publics, cela sera compliqué, à l'avenir anticipe Olivier Phélip. A nous de montrer aux entreprises l'intérêt de financer la formation ».