Start-up : un "manifeste" pour lever les freins à l'innovation

« Innovation et emploi, je t'aime, moi non plus ! » C'est le titre d'un « manifeste » destiné à lever les freins à l'innovation dans le champ de l'emploi et de la formation. Zoom sur une initiative des jeunes pousses edtech du corner innovation Centre Inffo.

Par - Le 24 janvier 2024.

Présenté lors de la 1e Journée de l'innovation[ 1 ]1#Rencontre de l'innovation – "Construire ensemble les futurs des apprentissages", événement Corner Innovation Centre Inffo organisé en partenariat avec l'Apec, le Cnam et la Fnadir, 3 octobre 2023., le manifeste « Innovation et emploi, je t'aime, moi non plus ! » vise à interpeller l'écosystème sur les difficultés des jeunes pousses de l'edtech à travailler avec certains acteurs de la sphère publique.

Derrière le slogan en forme de clin d'œil musical, se dessine une « relation douce-amère entre des acteurs qui auraient intérêt à travailler ensemble mais peinent parfois à le faire », commente Rodolphe de Torquat, directeur général de Learning Boost. On le devine, le sujet est délicat pour ces entrepreneurs qui évoluent sur une ligne de crête : comment engager le débat sans irriter tel ou tel acteur public ? Co-fondateur d'Olecio, Sébastien Levy Prudent explique : « il ne s'agit pas de s'inscrire dans une quelconque logique de pétition mais de poser les bases d'une discussion qui nous permette d'expliquer nos difficultés, en bilatéral avec les pouvoirs publics. » Et d'insister : « le manifeste, c'est bien moins du lobbying qu'un outil de dialogue. » Pour Rodolphe de Torquat, c'est tout le sens de « l'ombrelle Centre Inffo », opérateur d'État subventionné par le ministère du travail, qui joue ici un rôle d'animateur du débat public conforme au contrat d'objectifs et de moyens signé avec le gouvernement.

Lever les freins

Quels freins à l'optimisation des collaborations public-privé ? Aux obstacles déjà bien connus des milieux d'affaires et régulièrement soulevés par les organisations patronales – instabilité des politiques publiques, complexité des circuits de décision, difficulté à trouver le bon interlocuteur, … -, s'ajoutent un volet davantage propre à ces start-ups férues d'innovation. Exemple ? « La durée d'existence, l'absence de comité scientifique ou d'une recherche académique qui apporte des preuves tangibles de l'intérêt de l'innovation peuvent être des critères de rejet alors que beaucoup de start-ups partent d'une expérience dans le monde du travail », explique Rodolphe de Torquat.

Analyse partagée par Sébastien Levy Prudent, qui souligne que c'est bien souvent dans les usages que se révèle l'effectivité des solutions : « il faut expérimenter pour se rendre compte de ce qui marche ou pas ! » D'où le souhait des auteurs du manifeste : pouvoir accéder à des espaces de démonstration qui permettent aux potentiels acheteurs publics de pouvoir tester les solutions du marché[ 2 ]NDR : voir le modèle de l'« accélérateur pédagogique » déployé par Canopé en septembre 2021 ? (notre article).

Pour un véritable écosystème

Pour des structures de petite taille souvent peu familières des circuits administratifs, la difficulté est aussi de trouver la bonne porte d'entrée, de ne pas avoir à multiplier les dossiers selon que l'on s'adresse à l'échelon régional ou national et de ne pas perdre trop de temps à comprendre les attendus d'un appel d'offre.

Le monde rêvé pour ces start-ups ? Cartographie des acteurs, bases de données qualifiées, lettres d'information ou activités événementielles favorisant la rencontre des univers, tout ce qui permettrait de fluidifier la vie de l'écosystème serait bon à prendre.

Le manifeste le souligne, il s'agirait aussi de créer les conditions d'une meilleure adéquation de l'action publique aux besoins constatés sur le terrain. Un objectif qui pourrait passer par la création d'un collectif de réflexion qui serait régulièrement consulté par les pouvoirs publics, « un peu sur le modèle des conventions citoyennes », plaide Sébastien Levy Prudent.

Pour un État partenaire

Et puisqu'il s'agit de tout mettre sur la table, les jeunes pousses du corner innovation Centre Inffo s'interrogent aussi sur leur chance de remporter des appels d'offre qui les placent en concurrence avec des start-ups d'État. Loin d'être hostile à ce que les pouvoirs publics tissent des relations plus étroites avec le privé, le co-fondateur d'Olecio n'en appelle pas moins de ses vœux un changement de doctrine de l'action publique. Et, pourquoi pas, s'inspirer des travaux de l'ex directeur de cabinet de l'ancienne ministre déléguée en charge des PME, de l'innovation et de l'économie numérique Fleur Pellerin, Sébastien Soriano, auteur d'un livre [ 3 ]Un avenir pour le service public. Un nouvel État face à la vague écologique, numérique, démocratique.- 2020, Odile Jacob. qui prône un rôle de régulation pour l'État, non pas pour « prendre le pouvoir au marché », mais pour « architecturer l'écosystème […] dans le sens de l'intérêt général. » (voir).

Envie de dialoguer ? Écrivez à  Courriel: manifeste.cornerinnovation [at] centre [tiret] inffo.fr (remplacez les indications entre crochet)

Retrouvez l'exposé des problématiques et recommandations du Manifeste sur le site du corner innovation Centre Inffo.

Notes   [ + ]

1. 1#Rencontre de l'innovation – "Construire ensemble les futurs des apprentissages", événement Corner Innovation Centre Inffo organisé en partenariat avec l'Apec, le Cnam et la Fnadir, 3 octobre 2023.
2. NDR : voir le modèle de l'« accélérateur pédagogique » déployé par Canopé en septembre 2021 ? (notre article)
3. Un avenir pour le service public. Un nouvel État face à la vague écologique, numérique, démocratique.- 2020, Odile Jacob.